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L’islam

L’islam est l’une des trois grandes religions monothéistes. Comme les chrétiens, les musulmans croient que le monde a été créé par Dieu/Allah. Ils considèrent Adam, Noé, Abraham, Moïse et Jésus comme des prophètes. Mais les musulmans n’attribuent pas de caractère divin à Jésus. Pour l’islam, Moïse et Jésus ont été des prophètes et Mahomet reste le plus important et le dernier d’entre eux. Et c’est à lui qu’Allah aurait transmis la révélation ultime.
L’islam a connu plusieurs schismes au cours des siècles, mais toute la communauté musulmane respecte les cinq obligations fondamentales.

Les 5 piliers de l’islam

La profession de foi. « Il n’y a de Dieu qu’Allah et Mahomet est son Prophète. »

La prière. Elle a lieu 5 fois par jour après les ablutions, à l’aube, à midi, dans l’après-midi, au coucher du soleil et à la tombée de la nuit. Le croyant se tourne vers La Mecque, où qu’il soit. Le vendredi est le jour de la grande prière commune, conduite par l’imam, à la mosquée.

Le jeûne. Il a lieu le 9e mois du calendrier musulman (ramadan).

L’aumône. Les croyants se purifient en donnant une obole aux plus démunis.

Le pèlerinage à La Mecque. Tout musulman se doit, s’il en a les moyens, d’effectuer au moins une fois dans sa vie ce pèlerinage qui correspond à la grande fête du sacrifice, le dernier mois de l’année musulmane.
L’islam pratiqué en Turquie est principalement le sunnisme de l’école hanafite. Au temps de l’Empire ottoman, le sultan portait aussi le titre religieux de calife. Il était ainsi le garant de l’orthodoxie et le commandeur de tous les croyants. Les communautés musulmanes hétérodoxes, en revanche, ne possédaient pas de représentants propres et ne bénéficiaient pas du système du « millet » accordé aux chrétiens et aux juifs, qui permettait à un groupe religieux d’être légalement protégé. Dans l’Empire ottoman, mieux valait être non-musulman que chiite.

Le ramadan

Ce jeûne d’un mois vise à purifier le corps et l’âme. Le jeûne, entre le lever et le coucher du soleil, en est la manifestation la plus visible, mais les privations touchent aussi le tabac, les parfums et la vie sociale et sexuelle. Ces sacrifices ont pour but de raffermir la volonté des fidèles et de leur faire prendre conscience de la souffrance humaine. Le ramadan implique davantage d’entraide et de charité envers les plus pauvres. Cela en fait pour les musulmans un mois sacré pendant lequel ils se purifient et se rapprochent de Dieu. Il fait partie intégrante de la vie culturelle du pays et même les non-musulmans se retrouvent à la tombée du jour pour l’iftar (rupture du jeûne).
Bien que le ramadan soit suivi par seulement 35 à 40 % de la population, cette proportion n’est pas partout la même. Dans le quartier de Fatih, le chiffre monte à 90 %, alors que dans les quartiers de Pangaltı ou de Bomonti, seuls 15 % suivent la tradition.
La vie économique en est légèrement perturbée dans les grandes villes comme Istanbul ; c’est toute la ville qui prend part aux festivités. Certains magasins et les restaurants ferment plus tôt, les beuveries nocturnes sont plus rares, mais toujours présentes dans les quartiers festifs tels que Kadıköy et Beşiktaş. Pendant le ramadan, les lieux les plus prisés sont les cafés et les restaurants ayant une salle à l’étage ou en sous-sol. En règle générale, manger dans la rue n’est plus aussi mal vu qu’il y a encore quelques années, même dans les quartiers considérés conservateurs tels qu’Üsküdar. Une grande tolérance est accordée par les Turcs à ce sujet, surtout envers les étrangers. Quelques restaurants sont fermés en journée pendant le ramadan et ne sont ouverts que le soir. Peu avant le coucher du soleil, les salles se remplissent et les croyants attendent fidèlement l’ezan, l’appel à la prière du soir annonçant la rupture du jeûne. Ils boivent alors un peu d’eau puis dévorent leur repas. Il est aussi fréquent de voir des commerçants installer de grandes tables devant leurs échoppes pour manger tous ensemble. La soirée se poursuit en consommant beaucoup de cigarettes et de verres de thé.
Le ramadan est aussi accompagné de petites traditions, comme commencer les repas par une olive ou une datte (habitude de Mahomet). Certains aliments ne sont fabriqués et consommés que pendant le mois sacré, par exemple le pain rond et plat appelé pide (un délice à essayer absolument). Les horaires de bus interurbains peuvent être modifiés pour permettre aux voyageurs et au personnel de s’arrêter manger pour l’ezan. Si ce n’est pas le cas, il y a toujours quelqu’un dans le bus pour sortir un pain et le partager avec les autres. Le touriste non musulman peut prendre un petit déjeuner à l’heure qu’il veut dans son hôtel ou trouver facilement un kebab à midi. Le ramadan est suivi d’une fête qui peut s’étaler sur plusieurs jours (Seker Bayramı, ou fête du sucre). Pendant le ramadan, il est interdit de manger après le lever du soleil. Les gens qui veulent prendre leur petit déjeuner avant une longue journée de labeur se réveillent donc à l’aurore. Une tradition veut qu’un joueur de tambour passe dans chaque rue afin de réveiller les pieux dormeurs. Ainsi, pendant quarante jours, il sillonne les quartiers de la ville en essayant de faire le plus de bruit possible. Généralement, il passe ensuite dans chaque building pour réclamer une compensation pour sa peine.

L’« affaire » du voile turc

La Turquie connaît, elle aussi, son « affaire du voile », ou « turban » comme on dit ici. Depuis l’instauration de la République, le port du voile, un foulard noué lâche dans les cheveux, est interdit dans l’administration et l’université.
Mais depuis le début des années 2000 et la venue de l’AKP au pouvoir, la question de son autorisation à l’université suscite des débats passionnés entre d’un côté les tenants d’une laïcité pure et dure dans la droite lignée kémaliste, et de l’autre les conservateurs musulmans rejoints par une frange féministe pour qui le port du voile est l’expression d’un choix libre et individuel.
À la rentrée 2010, le foulard était autorisé sur les campus, puis à l’université en 2014, suivi de près par la levée de l’interdiction dans la fonction publique, en dehors de certains corps de métiers tels que l’armée, la police et la magistrature. Cette cohabitation entre religion et laïcité crée de nombreuses crispations et ambiguïtés. Par exemple, une étudiante en droit, si elle peut se couvrir la tête durant ses études, ne pourra pas exercer en tant que magistrate si elle porte le foulard. Toutefois, le parti au pouvoir, aux inspirations islamo-conservatrices, modère l’interdiction, en indiquant que les femmes juristes ou des forces de l’ordre pourraient bénéficier du droit de porter le voile si leur hiérarchie les y autorisait. Le port du voile intégral reste en revanche interdit.

Les alévis

Il existe aussi une importante minorité musulmane non sunnite dont les membres portent le nom d’alévis. Ils ont développé des croyances et des pratiques religieuses inspirées par l’animisme, le chamanisme, le chiisme et le soufisme populaire. Cette minorité hétérodoxe, dont on évalue le nombre entre 20 et 25 % de la population turque totale, a la réputation d’avoir été particulièrement favorable à l’inauguration du régime républicain. Ils constituent encore aujourd’hui une communauté aux idées novatrices et très ouverte. Dès les années 1920, ils s’affichent comme les défenseurs résolus de la laïcité. Ils sont souvent désignés comme les « protestants de l’islam », car apparentés au chiisme par leur reconnaissance d’Ali et des imams qui lui ont succédé. Les alévis se distinguent de l’orthodoxie musulmane turque par différentes pratiques. Ils ne suivent pas les prières quotidiennes, le pèlerinage ou le jeûne du ramadan. Ils n’ont pas de mosquées, mais se livrent à des cérémonies collectives et mixtes durant lesquelles ils dansent et ils chantent. Ils ne respectent pas la prohibition de l’alcool, défendent la libre interprétation du Coran et célèbrent le culte des saints auxquels ils attribuent des pouvoirs surnaturels.
En période de crispation identitaire, ces pratiques ont suscité des manifestations de méfiance et d’hostilité. En 1993, à Sivas, un groupe d’artistes et d’intellectuels alévis réunis pour un festival culturel est bloqué dans un hôtel par des islamistes radicaux. Après plusieurs heures de siège, ces derniers mettent le feu à l’établissement. L’incendie cause la mort de 37 personnes.
Répandu essentiellement dans les campagnes dans les années 1950, aujourd’hui, l’exode rural aidant, l’alévisme a gagné les villes.

Les derviches tourneurs - le soufisme

Le nom de « derviches tourneurs » trouve son origine dans le mot persan darwich qui signifie « pauvre ». Ces religieux musulmans appartiennent à l’ordre soufi des mevlevi, fondé au XIIIe siècle par le poète mystique Djalal al-Din al-Rumi, conçu pour islamiser les steppes d’Anatolie chrétienne par le chant, la danse, la transe et la poésie. Les derviches tourneurs sont une confrérie musulmane qui entre en communion avec Dieu par des danses mystiques. Cette confrérie est divisée en plusieurs branches, la plus connue étant sans doute celle des mevlevi. Il existe aussi les bektachis et une branche appelée derviches hurleurs, dont les membres entrent en transe au bout d’une longue période de chants ressemblant à des hurlements.
Considérée comme secte par l’islam orthodoxe (sunnite), la confrérie des derviches est interdite en 1925 par les lois d’Atatürk. Les couvents sont fermés, mais les adeptes continuent de pratiquer en secret jusque dans les années 1950, où une certaine tolérance leur permet de réintégrer leurs anciens lieux de culte. Aujourd’hui, cet ordre n’est présent que dans deux villes, Istanbul et Konya, où plusieurs couvents (tekke) sont toujours en activité et où vous pouvez assister à des cérémonies. Celles-ci sont d’ailleurs devenues des attractions touristiques dont il faut se méfier.

Les chrétiens

Il est difficile d’estimer précisément le nombre de chrétiens qui vivent en Turquie, d’autant qu’ils sont divisés en différents rites, dogmes et groupes. Les Arméniens forment le principal groupe : ils sont environ 400 000 dans toute la Turquie avec une forte concentration dans les villes, notamment à Istanbul. Les Grecs orthodoxes sont, à l’inverse, peu nombreux. Ils représentent quelque 30 000 personnes et la communauté est vieillissante. Ils sont installés dans les grandes villes et dans les îles de Gokçeada et de Bozcaada, pour la plupart. Il y a aussi les Arabes et Turcs orthodoxes, Moluques, Russes, Bulgares, Serbes, Arnautes (Albanais), Géorgiens orthodoxes…
Les catholiques romains habitent dans les villes d’Istanbul, Akara, Izmir et Antakya. Les catholiques orientaux, eux, sont un peu partout sur le territoire, en particulier à Istanbul et à Izmir.
Au Sud-Est, la communauté chrétienne des Syriens jacobites, ou Assyriens, est importante. Tur Abdin est le centre de leur culture. Le conflit syrien est venu augmenter considérablement leur nombre dans le pays.

Les juifs

C’est une petite communauté concentrée majoritairement à Istanbul, mais aussi à Edirne, Bursa, Çanakkale, Izmir, Antakya et Kuşadası. Les juifs représentent un peu moins de 20 000 personnes dans le pays. 90 % de cette communauté sont des juifs séfarades chassés d’Espagne au XIVe siècle. Les autres sont les ashkénazes, les marranes, les caraïtes.