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Joueur de Pelote Basque ©  OSTILL is Franck Camhi - shutterstock.com.jpg
Juan Martínez de Irujo, joueur professionnel © imagestockdesign - shutterstock.com.jpg

Un sport issu du jeu de paume

À l’origine de la pelote basque, le jeu de paume est une pratique française ancestrale, dont on trouve les premières mentions au Moyen Âge. Le jeu consiste alors à renvoyer une balle avec la paume de la main – le gant de cuir intervient au XIIIe siècle et la raquette au XVIe siècle. Le jeu de paume est donc l’ancêtre de la pelote basque, mais aussi du tennis et d’une manière générale de tous les jeux de raquette. Les Basques vont adapter ce sport au cours du XVIIe siècle et y appliquer des règles et des installations spécifiques.

Les coutumes basques influent alors sur la tenue du joueur, le pelotari, pantalon blanc, chaussures de sport à teinte blanche et polo aux couleurs du club, mais aussi sur le matériel, comme la pelote et la chistera qui sont fabriquées selon des techniques artisanales propres à la région.

Une tradition de transmission

Certaines écoles, principalement dans le Sud-Ouest de la France, proposent des initiations de pelote basque à leurs élèves, mais le sport n’est pas intégré de manière régulière dans le cursus scolaire. Plusieurs passionnés ont pourtant réalisé des « kits pédagogiques » afin d’inciter les professeurs d’EPS à pratiquer ce sport. Les cours de récréation basques ne sont toutefois pas en reste quant à la pratique libre, avec notamment les versions « montante et descendante » ou la variante « à la porte ». Ainsi, les jeunes pelotaris s’inspirent de leurs aînés pour apprendre, en assistant aux entraînements et aux matchs sur les frontons extérieurs – le sport étant joué sur tous les frontons de la région.

Ils s’inspirent également en admirant les joueurs passés pros et connus internationalement. On pense ainsi à Sylvain Brefel, ce Toulousain devenu le premier Français à passer en ligue professionnelle depuis trente ans. Il est spécialiste en pala larga. Autre personnalité en vue, Eric Irastorza, originaire de Bidart et spécialiste en cesta punta. Il joue aujourd’hui à Miami (nouvelle terre de pelote) et détient cinq titres de champion du monde, dont trois en professionnel. Enfin, Daniel Michelena, originaire de Saint-Jean-de-Luz, est lui aussi spécialiste en cesta punta. Après avoir longtemps joué sur les frontons basques, il est désormais recruteur et manager du fronton de Miami.

Une fabrication très artisanale

Outre l’aspect très culturel de la pelote basque, ce sport témoigne fortement de l’artisanat basque. Les équipements de pelote basque sont fabriqués artisanalement en France et en Espagne – seuls quelques artisans basques les fabriquent encore. Les chisteras de châtaignier et d’osier sont tressés à la main par la famille Gonzales depuis 1887, à Anglet. Chaque chistera exige 20 à 25 heures de travail artisanal, pour un prix entre 250 et 340 €. L’un des membres de cette illustre famille, lui-même ancien joueur, est également enseignant de cesta punta. À Ascain, à la frontière espagnole, un autre artisan très réputé travaille les pelotes – toutes les pelotes, pour toutes les spécialités (main nue, chistera, paleta cuir, cesta punta …). Ander Ugarte coud lui-même les pelotes, après qu’une machine ait entouré le noyau de buis de latex et de laine. Il est particulièrement reconnu par les joueurs pros, qui s’arrachent ses services. Depuis 2019, un jeune artisan, Ellande Alfaro, a également lancé son entreprise de fabrication à Sare (quelques kilomètres au sud d’Ascain), après avoir été formé par un ancien artisan.

Un jeu, différentes spécialités

La pelote basque est un jeu alliant force et habileté. Elle se joue de façon indirecte le plus souvent (sauf au rebot, à pasaka). Le but du jeu est de renvoyer la pelote contre le fronton (frontis en espagnol), soit à la volée soit après un rebond. La pelote doit retomber sur l’aire de jeu (cancha). La balle est gagnée lorsque l’adversaire commet une faute (falta) en renvoyant hors de la cancha ou qu’il ne parvient pas à renvoyer la balle directement ou après le rebond contre le mur. Les limites de but dépendent du terrain de jeu et de la spécialité pratiquée. Elles sont aussi adaptées aux catégories d'âges et de sexe.

Pratiquée dans tous les villages du Pays basque, mais aussi de Navarre et de la Rioja, la pelote basque se décline en différentes spécialités, douze ou vingt-deux selon les fédérations. Nous détaillons ici les plus courantes. Notons en préambule qu’il existe, outre la main nue, plusieurs équipements pour renvoyer la pelote, la chistera (sorte de gant en osier, plus ou moins courbé et profond selon les variantes), substituée au gant au XIXe siècle pour lancer plus loin, (chistera signifie « lancer » en français), la pala (raquette en bois) et le pasaka (gant en cuir).  La pelote basque peut être jouée sur trois types de terrains : le fronton en place libre (frontis ou plaza) – composé d’un seul mur de frappe avec un sol en terre battue ou en dur, c’est le terrain le plus courant, chaque village en possède un ; le fronton-mur à gauche – installation couverte composée d’un mur de frappe, d’un mur latéral (qui longe le terrain sur la gauche de 30 ou 36 m, voire 54 m pour le Jaï Alaï) et d’un mur de fond – (pilotaleku en basque) ; et le trinquet (terrain couvert fermé à quatre murs, hérité de la salle de jeu de paume français).

La première spécialité est à main nue, sans aucun matériel. Elle est considérée comme la version la plus pure de la pelote. La main nue est jouée sur les frontons en place libre, mais aussi en trinquet ou en fronton-mur à gauche. Une partie se joue en solo, c’est-à-dire deux joueurs face à face ou en double, avec un joueur avant et un arrière.

Vient ensuite le chistera joko garbi ou « limpio » (jeu pur), dont le gant est plus court et moins profond que le chistera. Joko garbi signifie « petit gant » en basque. Le jeu est ainsi plus vif. Lorsqu’elles jouent en plein air, deux équipes de trois joueurs s’affrontent ; en intérieur, sur un mur à gauche de 36 mètres, ce sont deux équipes de deux joueurs qui évoluent.

Le Pasaka (qui signifie « gant de cuir » en basque) est également très ancien et se rapproche beaucoup du jeu de paume. Il est joué en trinquet, au-dessus d’un filet, les deux équipes de deux étant de part et d’autre, avec une main gantée de cuir.

Plus récente que les précédentes versions, la cesta punta se joue à deux équipes de deux, avec une chistera dans un fronton place libre, mur à gauche long de 80 mètres. On l’appelle également le Jaï Alaï. La cesta punta est une version plus rapide du grand chistera, avec un gant très courbe qui permet un blocage de la balle. Particulièrement spectaculaire, c’est la variante la plus connue de la pelote basque, elle est réputée pour être le sport de balle le plus rapide du monde avec des balles pouvant atteindre les 300 km/h. On raconte qu’un célèbre joueur de pelote, nommé Chiquito Gambo, utilisa son gant pour lancer des grenades contre les Allemands sous l’Occupation pendant la Seconde Guerre mondiale.

La version pala ou paleta (raquette en bois) se décline elle-même en différentes variantes selon le type de raquette. Le principe reste le même, frapper la balle avec une raquette, d’une main ou l’autre. En fonction des types de palas ou paletas, le jeu est plus ou moins rapide et intense : paleta cuir, pala corta (plus lourde), paleta gomme creuse (en bois exotique, jouée avec une pelote en gomme creuse), paleta gomme pleine.

Le Rebot met en jeu deux équipes de cinq pelotaris, sur une aire de jeu extérieure. Ils jouent équipés d’un joko garbi ou d’un pasaka. Ils doivent s’appliquer à renvoyer la pelote dans les limites de leur camp – qui est divisé de manière inégale.

D’autres variantes sont jouées également hors du Pays basque, notamment en Argentine et au Mexique. Le xare est pratiqué avec une raquette dite « argentine », constituée d’un arceau en bois (noisetier ou châtaignier) courbé, et d’un filet en corde (flasque) en toile d’araignée au milieu. Cette version fut exportée par des religieux basques en Argentine, elle se joue seulement en trinquet. Le frontenis est pratiqué au Mexique et mêle les règles du tennis et de la pelote – la raquette utilisée est d’ailleurs une raquette de tennis classique, tendue de manière renforcée pour résister à la dureté de la pelote. Le frontenis se joue sur un mur à gauche de 30 m et, à la différence des autres formes, peut se jouer également en individuel. Notons que le frontenis et la pala sont les seules spécialités également féminines – les autres variantes sont exclusivement masculines.

Plusieurs championnats

Si la pelote basque se pratique principalement aux Pays basques français et espagnol, onze ligues régionales sont présentes en France. En Espagne, on compte deux ligues professionnelles sur lesquelles il est possible de parier. Au mois d’août a lieu la Grande semaine de la pelote basque qui présente les finales des Championnats régionaux dans tout le Pays basque, avec notamment le Gant d’or à Biarritz. Organisés par la Fédération internationale de pelote basque depuis 1952, les Championnats du monde ont également lieu tous les quatre ans et réunissent des équipes du monde entier : France, Espagne, Argentine, Mexique, Uruguay, Cuba, États-Unis et Chili. La Coupe du Monde de Pelote Basque fait office de présélection entre deux championnats. Actuellement, ce sont les seuls championnats internationaux qui ont cours, mais la Fédération internationale est en négociation avec le CIO pour tenter de remettre la pelote basque au programme des JO 2024 à Paris. Jusqu’à maintenant, l’unique épreuve de pelote basque aux JO a eu lieu en 1900, mais seules deux équipes étaient inscrites, la France et l’Espagne. Le jeu a ensuite été uniquement en démonstration en 1924 et en 1968 et en 1992.

L’Amérique, paradis des joueurs pro

Étonnamment, ce n’est pas au Pays basque que les puntistes et autres pelotaris prospèrent, mais bien outre-Atlantique. Si le jeu a conquis une grande partie du continent américain – grâce à l’immigration de nombreux Basques – il s’est particulièrement bien implanté en Floride. Les immigrés cubains l’ont ainsi importé à Miami – alors que le jeu était interdit par Castro sur leur île – sous la variante de cesta punta, jouée donc avec une chistera et livrant un spectacle d’autant plus enthousiasmant qu’il est ouvert aux paris. Actuellement, les meilleurs puntistes basés en Floride peuvent gagner près de 10 000 euros par mois et se mesurent au cours de la « World Jaï Alaï ». La cesta punta, ou jaï alaï, se joue aussi professionnellement au Mexique, à Mexico lors de la « Espectaculos Reales de Mexico », mais aussi dans d’autres villes mexicaines comme Tijuana.