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Les origines des trulli

Le mot italien trullo dérive d’un terme du dialecte, truddu, désignant une construction rurale couverte d’une voûte en pierres sèches. Ce terme semble lui-même issu du grec troulos signifiant « coupole ».

La légende fait remonter la naissance des trulli au XVIIe siècle. Le seigneur du coin, le comte de Conversano Giangirolamo Acquaviva, aurait détourné un décret royal lui interdisant de fonder une nouvelle agglomération. Il autorisa les paysans qui travaillaient ses terres à construire des habitations à la condition que celles-ci soient édifiées sans usage de mortier : de la sorte, elles pouvaient être facilement démontées en cas d’inspection royale. C’est ainsi que les premiers trulli seraient nés. Toutefois, aucun document historique ne vient étayer ce récit.

Il faut plutôt chercher l’origine des trulli dans la technique ancestrale de la construction en pierre sèche que l’on rencontre sur tout le pourtour de la Méditerranée. Les murets de pierre sèche servaient aux paysans à délimiter les parcelles, à aménager des terrassements, à protéger les habitations et, par la suite, à construire des étables précaires pour les animaux. Il faut aussi prendre en compte le contexte géologique de cette partie des Pouilles : les Murge forment un plateau karstique modelé par les eaux de pluie qui s’infiltrent dans les fissures de la pierre calcaire pour former des ravins, des grottes et des dolines. Partout, la pierre calcaire affleure à la surface et est un matériau de construction directement disponible et à moindre coût.

Les trulli naissent d’abord comme abris temporaires occupés par les ouvriers agricoles au moment des moissons ou des vendanges. En dehors des Murge, on peut apercevoir des trulli disséminés dans la campagne du Gargano, du Salento et des environs de Bari, qui devaient connaître une occupation saisonnière. Les trulli des Murge se différencient du fait qu’ils sont habités de façon permanente et forment même des agglomérations. Mais ce phénomène est assez récent puisqu’il ne se développe qu’au XVIIIe siècle et s’amplifie au XIXe avec la reprise de l’agriculture dans la région (en particulier de la viticulture), entraînant un mouvement de population de la ville vers la campagne. Les hameaux de trulli s’étendent pour former des villages et c’est ainsi que naissent les agglomérations d’Alberobello et de Locorotondo.

La construction d’un trullo

Le trullaro est le maçon spécialisé dans la construction des trulli. La première étape consiste à creuser la citerne, élément indispensable à la vie quotidienne dans une région pauvre en eau. Son excavation livre une première quantité de pierres. La roche est mise à nu sur la surface correspondant à la future habitation et les murs extérieurs sont montés jusqu’à une hauteur variant entre 1,60 et 2 mètres, suivant un plan circulaire ou carré. Enfin intervient l’opération la plus délicate, la réalisation de la couverture de l’édifice. La voûte est construite en encorbellement : chaque assise circulaire de pierres est en saillie par rapport à l’assise inférieure, de sorte que l’espace central se réduit progressivement jusqu’au sommet. Il en résulte ce toit de forme conique si caractéristique du trullo de la Murgia. Les pierres plates de la couverture externe, appelées chiancarelle, sont légèrement inclinées vers l’extérieur pour éviter les infiltrations d’eau et pour canaliser l’eau de pluie vers une conduite jusqu’à la citerne de la maison. Les parois internes et externes des trulli sont souvent enduites d’un mortier et blanchies à chaux ; seul le toit conique conserve ses pierres apparentes, offrant un beau contraste de gris avec les murs blancs. Le trullo d’habitation est généralement agrandi par l’ajout d’extensions, elles aussi couvertes d’un toit conique.

Pinacles et symboles

Les toits pointus des trulli sont coiffés de pinacles sculptés et badigeonnés à la chaux. Ceux-ci possèdent des formes géométriques variées, des plus basiques aux plus élaborées : disque, étoile, vasque, polyèdre, sphère surmontée d’une croix… Pour certains, il s’agit d’éléments décoratifs, mais d’autres ont tenté de proposer diverses clés de lecture : il pourrait s’agir de la signature du maître trullaro ayant construit le bâtiment, la complexité du pinacle indiquant le degré d’habileté de l’artisan. A moins qu’un pinacle plus élaboré ne soit la marque du prestige social et économique des propriétaires du trullo.

Les toits de pierre grise sont souvent décorés d’un symbole peint à la chaux : religieux ou païens, ces signes expriment un souhait ou une protection contre le mauvais œil. Ils ont été classés en plusieurs typologies : les symboles chrétiens (la croix, l’hostie rayonnante avec le monogramme du Christ - IHS - , un trident symbole de la trinité, le cercle divisé en quatre quartiers avec les initiales de saint Côme et de saint Damien, les saints patrons d’Alberobello), les symboles hébraïques (l’étoile de David, la menorah à sept branches), les symboles magiques, les signes du zodiaque... Des initiales peuvent faire référence au nom du premier propriétaire du trullo, tandis que certains symboles se rapportent à l’activité de celui-ci (ustensiles de travail : pioche, faux, marteau) ou à ce qu’il produisait (grappe de raisin, épi de blé).

A la découverte des trulli

La vallée d’Itria, au sud du plateau des Murge, est la zone la plus riche en trulli. Vous en découvrirez lors de vos pérégrinations dans la campagne entre Alberobello, Locorotondo, Cisternino et Martina Franca, abandonnés et en partie écroulés, ou bien réhabilités en remises à outils ou en abris pour les animaux, au milieu des champs d’oliviers, des prairies et des potagers. Certains ont été transformés en habitations modernes et en gîtes locatifs.

Alberobello constitue une étape immanquable du fait du nombre et de la concentration de trulli que l’on y trouve. Ils sont regroupés dans les deux quartiers de Rione Monti, le plus ancien et le plus dense, et de Rione Aia Piccola. Pour visiter le Trullo Sovrano, le trullo aux dimensions les plus vastes, qui possède même un étage, il faut traverser la ville moderne. A l'intérieur a été reconstitué l’aménagement d’autrefois, avec quelques panneaux didactiques et une série d’ustensiles de cuisine et de travail évoquant la vie et les traditions paysannes.

Perchée sur sa colline, la commune de Locorotondo compte elle aussi un grand nombre de trulli regroupés en un quartier, mais aussi disséminés sur tout son territoire.

Enfin, pourquoi ne pas expérimenter la vie dans un trullo ? Entre l’appartement, l’hôtel de luxe et le Bed and Breakfast de charme, les possibilités de logements sont nombreuses et permettent de dormir sous les encorbellements sans renoncer au confort moderne. De belles adresses vous accueillent à Alberobello (Charming Trulli, Trulli e Puglia, Le Alcove, La Chiusa di Chietri), à Locorotondo (Poggio degli Ulivi, Masseria Aprile, Relais Il Palmento), à Putignano (Trulli Terra Magica) ou encore à Cisternino (Le Case di Serena).