La musique traditionnelle

Si l’on dit souvent que Singapour est une porte d’entrée sur l’Asie, c’est parce que le pays est la rencontre de plusieurs grandes cultures de la région – chinoise, indienne, malaise et tamoule – chacune cultivant sur place ses propres traditions. Les Chinois forment la communauté la plus importante (presque 75 % de la population). Leur tradition principale est celle des opéras classiques comme l’opéra Hakka, que certaines troupes passionnées s’échinent à préserver de la disparition ou l’opéra Teochew, originaire de la région du Chaoshan, dans le sud de la Chine et combinant musique, chant, arts martiaux, acrobatie et jeu d’acteur.

Il existe également des ensembles de chambres de Nanyin (ou Nanguan), une forme traditionnelle originaire de la province du Fujian, dans le sud chinois et remontant au temps de la dynastie Han. Remarquable par sa délicatesse mélodique et sa lenteur, le Nanyin est, dans sa forme traditionnelle, interprété par un groupe de cinq artistes, le chanteur étant assis au milieu entouré de musiciens jouant du dongxiao, une flûte en bambou, de l'erxian, une vielle à deux cordes, du pipa, un luth chinois, et du sanxian, un autre luth, une octave plus bas que le pipa.

Loin d’être relayé au rang de vieilleries, le Nanyin trouve aujourd’hui un nouveau public parmi les jeunes générations à Singapour, comme le prouve l'association musicale Siong Leng (fondée en 1941), constituée génération après génération, de musiciens souvent dans la vingtaine. S’ils pratiquent le Nanyin d’une manière très authentique au plus près de ses racines, Siong Leng tente également de faire évoluer le genre en expérimentant et en tentant de le marier au tabla indien, ou au kompang malais.

Extension de la musique Nanyin, l'opéra Liyuan est perçu comme une version dramatisée de cette dernière. Elle est l'une des formes les plus anciennes de l'opéra chinois.

Une bonne occasion d’approcher les traditions chinoises de Singapour est de se rendre au festival Huayi, se tenant durant les célébrations du Nouvel An chinois et proposant une programmation aussi traditionnelle qu’avant-gardiste.

Chez les Malais de Singapour, une des traditions les plus populaires est le Dondang Sayang. Cette discipline, axée autour d’une poésie très mélodieuse, aborde des thèmes comme l’amour et la générosité, accompagnée de violons, gongs et tambourins, traditionnellement interprétée par deux artistes, un homme et une femme. Chez les Malais toujours, on joue du kroncong (prononcer « kronchong ») un instrument cousin éloigné du ukulélé. Il a donné son nom au style musical dérivé de la tradition musicale portugaise – importée par les marins dans les villes portuaires indonésiennes au XVIe siècle.

Au sein de la communauté indienne de Singapour, les musiques hindoustani et carnatique, les deux grandes formes classiques sont très prisées. C’est également le cas du bhangra, un style de danse et de musique indienne provenant de la région du Pendjab, connue pour sa rythmique typique, jouée au tambour dhol.

Chez les Perenakans, on trouve un mariage de cultures chinoise et malaise. Son origine remonte au XVIe siècle lorsque les premiers immigrants chinois s’installèrent sur place et épousèrent de jeunes filles malaises. Leur musique traditionnelle est inspirée des airs malais, souvent chantés en anglais.

La musique populaire

Dans les années 1960, l’archipel est traversé par une vague de groupes locaux s'inspirant de grands succès occidentaux du moment comme Cliff Richard & The Shadows ou, bien entendu, les Beatles. Les vedettes de l'époque étaient de loin The Quests, groupe qui a multiplié les succès comme Shanty ou Don't Play That Song, The Western Union Band et leur hit Driving Me Crazy ou encore les October Cherries, beaucoup plus psychédéliques.
Au début des années 1980, Singapour aime le rock et plus particulièrement celui de groupes comme les Sweet Charity. Ce dernier est emmené par le chanteur Ramli Sarip, surnommé « Papa Rock » car véritable pionnier du genre dans le pays – et artiste globalement très aimé.

Les années 1990 ont été celles de l’exode où des artistes quittaient Singapour à la recherche d’une plus grande scène musicale. C’est notamment le cas de la fameuse chanteuse et danseuse du ventre Dawn Xiana Moon ou de Sophie Koh.
Singapour s’est également imposé comme un des centres névralgiques de l’industrie du disque chinoise et a vu naître quelques-unes des grandes stars de la pop en mandarin comme Kit Chan, Stefanie Sun ou JJ Lin.

La musique classique

Sur le front de la musique classique, l’Orchestre symphonique de Singapour (Singapore Symphonic Orchestra ou « SSO »), fondé en 1979 est la grande phalange du pays. Constitué de presque cent membres, cet imposant ensemble tourne beaucoup à l’internationale et a réalisé pas mal d’enregistrements, parfois pour des labels prestigieux. L’orchestre réside et se produit à l’Esplanade (le grand centre culturel du pays dont la forme rappelle le durian) ainsi que, plus sporadiquement, au Victoria Concert Hall.

Le chef principal est Hans Graf depuis 2020, un ancien de l’Orchestre du Mozarteum de Salzbourg et de l’Orchestre national Bordeaux Aquitaine. Le SSO a également vu débuter le grand talent local de la direction, Wong Kah Chun, qui a été depuis chef principal du Japan Philharmonic Orchestra, du Dresden Philharmonic et du Hallé (Manchester) - tandis qu’il n’a pas encore quarante ans… Un surdoué.

Le pays compte également quelques très bons solistes comme la célébrissime violoniste Vanessa Mae, aussi championne de ski (oui, oui) ou Siow Lee Chin, elle aussi violoniste, passée par le Royal Philharmonic Orchestra, l’Houston Symphony ou le National Philharmonic of Ukraine.

Les musiques actuelles

La scène électronique singapourienne s’épanouit énormément depuis quelques années (malgré une législation contraignante pour les clubs) et ce, en grande partie grâce à trois labels la portant tambour battant : Darker Than Wax, Midnight Shift et Syndicate. Ils produisent des albums de house, d’acid ou de techno et leurs artistes tournent dans le monde entier, dont à Berlin, une consécration.

En plus de ces labels, quelques artistes singapouriens sont parvenus à se faire un nom dans le paysage électronique mondial, comme Yeule et son mélange d'ambient, de paysages sonores abîmés et de post-pop asiatique.