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Les musiques et danses traditionnelles

La Bavière est une terre riche en traditions. Ses habitants en sont naturellement fiers et ne manquent jamais une occasion de les célébrer. Vêtus des costumes traditionnels, le Lederhosen pour les hommes et les Dirndl pour les femmes, les Bavarois chantent et dansent un large répertoire folklorique, à commencer par la schuhplatteln largement considérée comme la tradition chorégraphique bavaroise la plus reconnaissable. À l'origine, exécutée par des groupes d’hommes pour gagner les faveurs d’une dame, cette danse voit ses participants battre la semelle de leurs chaussures en rythme avec leurs mains. La schuhplattler existe également en tant que danse de couple. Autre forme extrêmement répandue en Bavière, le Landler, qui s'accompagne généralement de yodels, est une danse de couple, rapide, tout en sautillements. Vous en avez d’ailleurs peut-être déjà entendu puisque de nombreux compositeurs en ont invité dans leur musique, notamment Beethoven, Schubert, Bruckner ou Mahler.

Lorsqu’ils ne dansent pas (ou plus), les Bavarois aiment à écouter de la stubenmusik, de la musique folklorique d’ambiance jouée par de petits ensembles. Le Gstanzl est également une forme très populaire. Cette petite chanson drôle et moqueuse est généralement utilisée pour exprimer des mécontentements, s’apparentant peu ou prou à une épigramme. Composé normalement de quatre ou huit lignes et chanté en dialecte, le gstanzl aborde tous les domaines de la vie et n’hésite pas à moquer les autorités, l'État ou les travers de Monsieur et Madame tout-le-monde. Au XXe siècle, le genre s’est converti peu à peu à la satire politique, notamment entre les mains de Roider Jackl, devenu une figure emblématique de la discipline.

Naturellement, l’Oktoberfest, la fameuse fête de la bière, est le moment roi pour être aux premières loges des traditions musicales et chorégraphiques bavaroises. Plus grande fête populaire du monde, l’évènement est densément ponctué de danses et chants. Autrement, Fasching, le carnaval de Munich, avec son effervescence, contient toute la tradition locale au travers d’une bonne centaine de bals. La saison du carnaval munichois s’achève d’ailleurs avec München Narrisch - Munich en Folie : le jour de Mardi gras compte quelques belles attractions comme la « Danse des bonnes femmes du marché » sur la place du Marché des Victuailles.

La musique classique

Les mélomanes le savent bien – surtout ceux ayant eu l’occasion de se rendre au Festival de Bayreuth -, la Bavière a marqué l’histoire de la musique (et réciproquement) avec quelques-uns de ses plus grands compositeurs et interprètes.

En 1563, un certain Roland de Lassus est nommé maître de chapelle de la Cour de Bavière. Voilà comment et pourquoi ce Belge de naissance, un des plus grands compositeurs de tous les temps, reste associé avec la région. Un siècle plus tard, c’est Johann Pachelbel (1653-1706) et son inoubliable Canon qui fait briller la Bavière au temps du baroque. Au XVIIIe siècle, Christoph Willibald Gluck (1714-1787) transforme l'opéra avec sa célèbre « réforme » visant à introduire plus de naturel dans les interprétations et veillant à ce que la composition musicale soit toujours au service de l’action et du texte. C’est aussi à cette même époque que s’illustre Leopold Mozart, père de Wolfgang Amadeus, et natif d’Augsburg.

Mais bien qu’illustres, ces noms n’ont pas l’importance (surtout en Bavière) de celui de Richard Wagner (1813-1883). Véritable révolutionnaire dans l’âme, ce compositeur, né à Leipzig dans une famille brisée par les guerres napoléoniennes, a pour première passion le théâtre, qu’il découvre grâce à son père adoptif. C’est seulement à l’âge de 15 ans qu’il commence à s’intéresser à la composition musicale, pratiquement sans aucune technique acquise, en écoutant Mozart et Beethoven. Il aborde la vie musicale active à 20 ans. Sa vie sera marquée par un sentiment révolutionnaire qui se traduira aussi bien sur le plan de sa vie sociale que dans son œuvre. Dès son plus jeune âge, en 1830, il est déjà connu pour être un agitateur à Leipzig, après la révolution de Juillet en France, et, en 1849, il participe à la révolution qui éclate dans la ville de Dresde. Toutes ses créations refléteront cette tendance de son esprit : ce sont ses idées sur la vie qui seront développées dans les compositions de ce grand réformateur de la musique, que son inspiration va mener aux frontières de l’atonalité. Véritable poète de la musique, il conçoit l’opéra comme un spectacle total où se conjuguent tous les arts, et ses chefs-d’œuvre que sont Le Vaisseau fantôme (1839), La Walkyrie (1855), Siegfried (1856), le cycle de L’Anneau des Nibelungen et Le Crépuscule des dieux (1868) et Parsifal (1882) font partie de la mythologie de l’histoire de la musique. Par ailleurs, Wagner a posé les bases de la direction d’orchestre telle qu’elle est encore pratiquée aujourd’hui. Un compositeur important pour le monde et la région, cette dernière le célébrant chaque année au travers du célébrissime Bayreutherfestspiele, le Festival de Bayreuth. Le rendez-vous est devenu l’un des plus prestigieux au monde, en conviant chaque année les meilleurs orchestres de la planète à investir le répertoire wagnérien.

Contemporaine de Wagner, citons Joséphine Lang (1815-1880) qui, bien que beaucoup moins connue, demeure, aux côtés de Clara Schumann, une des plus importantes compositrices de lied du milieu du XIXe siècle. Très inspirée par Mendelssohn, ce dernier lui servira de mentor et donnera un grand élan à sa carrière.  Autre époque, autre Richard mais même talent, Strauss (1864-1949) est un très grand compositeur et chef d’orchestre de la région (né à Munich). Il a travaillé de nombreux genres : musique instrumentale pour orchestre, instrument soliste (dont le concerto) ou œuvres pour formation de chambre, poème symphonique, opéra, lied, ballet. Son œuvre la plus connue est le poème symphonique Ainsi parlait Zarathoustra (1896).

Au tournant du XXe siècle, on trouve Max Reger (1873-1916), compositeur très apprécié dans son pays, mal connu hors de ses frontières. Romantique dans l’âme, sa musique a souvent flirté avec les limites de la tonalité.

Contemporain de ce dernier, Carl Orff (1895-1982), lui aussi bavarois, reste célèbre pour avoir offert au monde l’inénarrable cantate Carmina Burana. Au XXe siècle, la Bavière a encore été la terre de musiciens, souvent aussi intéressants que méconnus.

Citons notamment Karl Amadeus Hartmann (1905-1963), oublié bien que très grand symphoniste, Jörg Widmann, très joué partout dans le monde et apprécié pour sa polyvalence, Hans-Jürgen von Bose, influencé par le post-structuralisme, ou encore Peter Michael Hamel, emblématique de la « Nouvelle Simplicité », mouvement allemand des années 1970 et 1980 prônant le retour à l’immédiateté, la mélodie et le langage tonal du XIXe siècle.

Côté interprètes, la région a vu naître l’excellente pianiste Alice Sara Ott, aussi douée chez Chopin et Liszt que dans le registre (très) contemporain, Arabella Steinbacher, l’une des meilleures violonistes de sa génération, célèbre par ses interprétations de nombreux concertos pour violon, ainsi que le géant de la direction, Wolfgang Sawallisch (1923-2013), que d’aucuns ont qualifié de monstre sacré du XXe siècle. Il demeure le plus jeune chef jamais invité (en 1957) au Festival de Bayreuth où ses interprétations ont laissé un souvenir impérissable.

Naturellement, la région a aussi été un vivier incomparable pour les grandes voix lyriques wagnériennes : Sophie Diez (1820-1887) bien sûr mais aussi Josephine Schefsky (1843-1912), Marianne Schech (1914-1999), le ténor Heinrich Knote (1870-1953) ou plus récemment le très révéré Jonas Kaufmann. Dans un autre registre n’oublions pas de citer les sopranos Diana Damrau et Christina Landshamer qui participent grandement au prestige artistique de la région.

L’été, la Bavière devient un centre international de festivals et de semaines musicales des plus courus. Hormis Bayreuth, se déroule par exemple ici le Münchner Opernfestspiele, le Festival de l’Opéra à Munich qui propose une trentaine de représentations de classe mondiale. L’évènement prend place au National Theater Bayerische Staatsoper, le fameux Opéra de Bavière. En plus du Nationaltheater, l’ensemble abrite le Prinzregententheater, la Allerheiligen Hofkirche et le Théâtre Cuvilliés. Chaque saison propose à partir de septembre une programmation stupéfiante, offrant une large place à son prestigieux orchestre en résidence dont la direction a toujours été assurée par de grands maîtres (entre autres : Strauss, Mehta, Nagano, Petrenko et désormais Jurowski). L’ensemble n’est pas le seul d’importance à Munich et dans le pays puisque l’Orchestre philharmonique de Munich est aussi excellent (et particulièrement réputé), tout comme sa liste de directeurs : Celibidache,  Levine, Thielemann, Maazel ou encore Valeri Guerguiev. Pour assister à une représentation, direction la Philharmonie Im Gasteig. Le bâtiment inauguré en 1985 mit fin à 40 ans d’exil de la Philharmonie. La salle d’origine, la Tonhalle, fut en effet bombardée pendant la Seconde Guerre mondiale et jamais reconstruite. En plus de la Philharmonie, le bâtiment abrite des espaces d’expositions temporaires où la photographie, la littérature et la sociologie sont à l’honneur. Le Gasteig accueille également de nombreux festivals. Il s’y passe ainsi forcément quelque chose. Dernier lieu notable à Munich, n’oublions pas de mentionner le Staatstheater Am Gärtnerplatz, jolie salle couvrant les domaines de l’opéra, de l’opérette et de la danse.

Autrement, comme mentionné précédemment, la région est incroyablement dynamique l’été et accueille entre autres la Semaine Bach, à Ansbach, la Semaine internationale de la musique d’orgue de Nuremberg, le Festival d’été de Bad Kissingen (Kissinger Sommer) ou encore le Festival Mozart de Wurtzbourg. Mentionnons également l’Audi Sommerkonzerte d’Ingolstadt offrant un mois de concerts classiques conviant de grands noms de la scène.

Les musiques actuelles

Un petit mot sur les musiques actuelles. Berlin n’a pas l’hégémonie de la musique électronique allemande, et quelques figures importantes de cette dernière proviennent de la région, et particulièrement de Munich, comme l’incontournable DJ Hell, pilier de l’électro allemande. Ou bien encore Zombie Nation, auteur de Kernkraft 400, tube inoubliable. Plus récemment, ce sont les Zenker Brothers qui ont replacé la capitale bavaroise sur la cartographie de la techno avec leurs productions ainsi que celles éditées sur leur label Illian Tapes. Ce dernier est notamment la maison de Skee Mask, (encore) un Munichois talentueux et une perle de la techno actuelle.

Dans un autre genre, impossible de ne pas mentionner Edition of Contemporary Music, ou ECM, label parmi les plus prestigieux et respectés, installé à Munich et ayant édité quelques titres mémorables de jazz, de classique contemporain et d'avant-garde.

Pour un concert de qualité à Munich, il est plus conseillé de se rendre à Muffatwerke, ancienne centrale électrique transformée en salle de concert connaissant un énorme succès ou alors, pour quelque chose de plus alternatif, à Backstage, ou encore Strom pour des affiches underground.

Le théâtre

La Bavière a été la terre natale de nombreux maîtres de la dramaturgie allemande. C’est par exemple de Nuremberg qu’est originaire Hans Sachs (1494-1576), prolifique poète et tragédien du XVIe siècle. C’est également d’ici que sont originaires August von Platen (1796-1835), grand romantique allemand, ou encore Frank Wedekind (1864-1918), illustre dramaturge dont l’œuvre a ouvert la voie au mouvement expressionniste allemand des années 1920 et qui eut une influence durable sur le théâtre allemand. Wedekind est surtout connu pour Lulu, fameuse série de deux pièces trempées de luxure et de désir. N’oublions surtout pas Berthold Brecht (1898-1956), natif d’Augsburg, grand penseur du théâtre épique et intemporel auteur de L'Opéra de quat'sous et La Résistible ascension d'Arturo Ui.

Quelques occasions de voir du théâtre en Bavière : le Spielart, festival de Théâtre de Munich se tenant de fin octobre à mi-novembre, ou le Staatstheater Nürnberg, magnifique bâtiment érigé en 1905 offrant une bonne programmation. À noter également, le Deutsches Theatermuseum, musée du théâtre allemand où toute l’histoire du théâtre germanophone est exposée avec près de 2 millions de photographies, des décors, des masques et des costumes utilisés lors de représentations de pièces.