Skatteur au célèbre South Bank Centre qui a mis ses murs à disposition des graffeurs. (c) ChameleonsEye-shutterstock.com .jpg
Indien street art (c) Stéphan Szeremeta.jpg

Les débuts du street art à Londres

Comme on pouvait l’imaginer, le Royaume-Uni a été fortement influencé par la scène new-yorkaise. L'art du métro était perçu comme une « bible du street art », selon l'artiste londonien Remi. À cette époque, au début des années 1980, la peinture automobile est pratiquement le seul outil dont disposaient les taggeurs. Les cultures du hip-hop et de musique électro font leur apparition à la radio à la fin des années 1980 en Angleterre. Le street art est né dans l’illégalité et la clandestinité à Londres comme partout dans le monde et la ville très conservatrice se bat alors contre ce qu’elle considère comme un fléau. Il faut alors citer Brixton, qui abrite le célèbre Stockwell Hall of Fame, niché au milieu du Stockwell Park Estate sur Aytoun Road.

Le Hall of fame

Le Hall of Fame, un ancien terrain de sport, est l’un des premiers lieux de peinture légale de la ville et compte toujours un bon nombre d’artistes prêts à enduire les murs de couches épaisses de peinture. Le terrain de basketball se trouve au bout de Broomgrove Road. Depuis le début des années 1990, les street artistes peuvent y créer librement. Les grands pionniers du graffitis sont venus au fil du temps peindre sur ce mur : Slick, un street artiste originaire de Los Angeles, Duster UA, un graffeur new-yorkais installé en Californie, Ivory, qui a commencé à peindre dans le Bronx à New York comme son ami Tats Crew, le Britannique Goldie, la bande francilienne des Ghetto Farceur… Au total environ 40 artistes peuvent occuper a priori l’espace de ce mur qui contient de multiples couches de peinture. Environ 10 pièces par semaine peuvent être réalisées en moyenne. Tout travail médiocre est enlevé.

Le Cans Festival de Banksy

Au cours des 50 dernières années, le graffiti et le street art ont beaucoup évolué, donnant naissance à un mouvement majeur dans le monde de la peinture. Mais Londres n’avait pas de festival, à l’inverse d’autres grandes capitales. En 2008, du 3 au 5 mai, durant trois jours entiers, Banksy, fort d’une renommée internationale, invite à Londres une trentaine d’artistes du monde entier au Cans Festival qui se déroule dans l'ancien tunnel qui reliait les taxis à la gare de Waterloo. Grâce à l'aide de la compagnie Eurostar, il a mis en œuvre une exposition unique en son genre. Sont présents Andreas Hamran Færø aka Dolk, graffeur le plus connu de Norvège avec Pøbel qui est là aussi, l’Anglais Charles Uzzell-Edwards aka Pure Evil, le Londonien Eelus, l’Australien Vexta, ainsi que le jeune Portugais Alexandre Farto aka Vhils (qui fait un tabac avec ses fresques) pour n’en citer que quelques-uns, sans oublier la star du graffiti Xavier Prou aka Blek le Rat, un artiste pochoiriste français né en 1951 à Boulogne-Billancourt. Le chanteur Robert Del Naja de Massive Attack, que l’on soupçonne aujourd’hui d’être Banksy lui-même, participe à la soirée d’inauguration du festival. Des heures de queue attendent déjà les fans et le bout du tunnel est réservé à la spontanéité du public venu en nombre voir cet événement qui fait la une des quotidiens britanniques. Surnommé le Banksy Tunnel, ce lieu peut être visité aujourd’hui.

Les quartiers de Londres où voir du street art

Mais des quartiers entiers sont aussi prisés depuis ces dernières décennies par les amateurs de street art à Londres, tel Shoreditch, l’un des meilleurs endroits pour voir des graffitis, qui mêle les influences indiennes et bangladaises de Brick Lane, le Spitalfields Market et Liverpool Street – au cœur du quartier financier de la City. Passages obligés des fans, Rivington Street, Great Eastern Street, Cremer Street, Princelet Street, Toynbee Street, Shoreditch High Street, Fashion Street, Brick Lane, Bell Lane, toutes ces rues vous font signe avec leurs grandes fresques peintes par des graffeurs renommés à l’international comme Banksy bien sûr, mais également C215, Otto Schade ou Mr Cenz. Depuis 2015, d'une friche stérile à côté de la voie ferrée dans un quartier peu attrayant de Shoreditch, The Nomadic Community Garden, s'est transformé en un espace urbain autonome remarquable. Il s’agit-là d’un jardin partagé. Le grand mur qui donne sur le jardin est rapidement devenu l'élément central du Graffestival qui a attiré artistes et musiciens pendant six éditions, avec un ultime clap de fin en 2018. En effet des promoteurs sont venus fermer le lieu qui n’existe plus aujourd’hui. Rassurez-vous, d’autres lieux dédiés au street art à Londres existent. Le Southbank Centre a fait don des murs de son célèbre skate park à des graffeurs. Le meilleur art de rue se trouve près du skate park, qui accueille divers festivals. En outre, Bethnal Green, un quartier authentique de l’Est de Londres demeure ainsi loin de la carte postale, et bien des graffeurs s’y sont collés et s’y collent encore. Et le street art du quartier de Camden qu’affectionnait la chanteuse Amy Winehouse, se concentre principalement dans un rectangle entre Hartland Road au nord, Pratt Street au sud, et entre Camden street à l’est et Camden High Street à l’ouest.

Parmi les personnalités qui ont marqué le street art à Londres, Roa est un street artiste belge qui a roulé sa bosse dans le monde entier. Il a posé sa griffe sur les murs de la capitale et a exposé à la Pure Evil Gallery. Ses fresques gigantesques représentent des animaux, principalement en noir et blanc. A l’image de Banksy, il souhaite travailler dans l’anonymat et ses relations avec les autorités ne sont pas toujours évidentes. A Londres, son œuvre la plus connue est sans doute le lapin géant situé sur Hackney Road. Alors qu’il avait au préalable reçu l’autorisation de réaliser cette œuvre, le Hackney Council, en 2010, souhaitait l’effacer purement et simplement. Heureusement, une pétition et une mobilisation des habitants permirent de sauver la fresque.

Enfin, citons Dale Grimshaw, natif de Lancashire, diplômé des Beaux-Arts à Londres, qui expose dans les galeries du monde entier et peint sur les murs emblématiques de Londres, où il vit. Ses imposantes fresques colorées sont principalement des portraits, notamment de membres de tribus indiennes, un vrai contraste au milieu du paysage urbain.