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Landes ou bois : quels sont les vrais paysages de l’Écosse ?

Qui dit Écosse dit, dans l’imaginaire collectif porté par des œuvres comme Le Chien des Baskerville d’Arthur Conan Doyle ou des films comme Braveheart, landes à perte de vue, entre fougères d’un vert éclatant, bruyères aux mille nuances de mauve et de rose et terre noire assombrie par la tourbe. Et si les vrais paysages d’Écosse, ce n’était pas ça ? Ou pas que ça ? Et si la vraie nature de l’Écosse était tout autre ? L’association Trees for life œuvre pour une restauration de la forêt calédonienne (autre nom pour désigner les Highlands). Rien que son nom, « Calédonia », témoigne de ce paysage aujourd’hui disparu. En effet, donnée à l’époque romaine et issue du latin, cette désignation signifie « hauteurs boisées ». Cette appellation, en décalage complet avec les paysages actuels, a de quoi déstabiliser. Toutefois, selon les recherches de scientifiques, la forêt aurait autrefois couvert 1,5 million d’hectares et aurait été composée de bouleaux, pins sylvestres, trembles et autres essences. De nos jours, on estime que 99 % de cette forêt a disparu. La déforestation s’explique par multiples épisodes historiques et économiques : la sylve originelle aurait été brûlée par les Vikings lors des invasions, puis ensuite pour éliminer les loups. Le bois aurait été abattu en quantités exagérées et le pâturage intensif, allié à l’augmentation des hardes de cervidés, n’aurait pu se régénérer. Tout cela appartient au passé. Place est faite désormais à une nouvelle exploitation de la forêt en gestion durable et responsable et à des replantations d’essences diversifiées, mais – et cela est un point clé ! – natives du pays. Le Royaume-Uni a pris le problème à bras le corps : Forest Entreprise Scotland, organisme étatique, contribue à la gestion des forêts publiques et 22 % (d’après des sources de 2016) des forêts privées sont certifiées PEFC ou FSC (labels européens et mondiaux de gestion durable). Le Scottish Natural Heritage joue aussi un rôle clé dans les campagnes de reboisements actuelles. Vous apercevez des zones déboisées récemment ? C’est sans doute l’exploitation forestière, voire la suppression d’espèces non endémiques… Ne criez pas au scandale : la méthode est certes à la coupe rase, mais suivie d’une replantation qualitative et bénéfique, pour l’environnement et dans une durée qui dépasse l’échelle d’une vie humaine. En ligne de mire : un plan de reboisement d’un cinquième de l’Écosse !

Aux considérations écologiques s’ajoutent des intérêts touristiques et récréatifs. La forêt est un lieu de loisirs sportifs et de promenade très apprécié, d’où, aussi, les parcs nationaux et autres parcs qui jalonnent le pays.

Des arbres remarquables très (très !) remarquables

Les arbres pluricentenaires sont légion en Écosse. Certains sont même millénaires et quelques domaines se vanteront volontiers (et à raison) de posséder certains des plus vieux arbres du pays. Si vous vous promenez dans le Pertshire, à proximité d’Aberfeldy, faites un détour par Fortingall pour découvrir son célèbre if. Situé à l’angle de son cimetière, il serait vieux de 5 000 ans selon certains, 9 000 ans selon d’autres. La légende raconte qu’il avait déjà 3 000 ans lors de la crucifixion du Christ et que Ponce Pilate, du temps de sa jeunesse dans l’armée romaine, se serait assis sous ses branches. Il est le plus vieil arbre d’Europe.

Attention, traversée de canards et de loutres…

La faune sauvage est l’un des autres grands intérêts de l’Écosse pour qui aime observer les animaux dans leur milieu naturel. Vous serez sans doute surpris de découvrir sur la route quelques panneaux inhabituels signalant la traversée possible et courante de canards ou loutres.

Le littoral écossais, escarpé et dentelé, s’étend sur des milliers de kilomètres. Chaque crique, chaque falaise, chaque plage abritent une faune sauvage variée, qui se laisse aisément observer. Ainsi, les îles des Shetland et celle de Handa accueillent de nombreux oiseaux marins, qui feront le bonheur des ornithologues amateurs : macareux, guillemots, mouettes tridactyles, huitriers-pies, et même pingouins. La plus grande colonie de fous de Bassan habite l’île de Bass Rock, au large de North Berwick, à une heure en voiture d’Édimbourg (ou 30 min en train). Visitez le Scottish Seabird Centre pour tout savoir sur les espèces d’oiseaux du pays et offrez-vous une excursion en bateau avec ses guides naturalistes. Les Northern Isles sont probablement le site le plus fréquenté par les ornithologues. Le célèbre observatoire de Fair Isle comme la réserve de North Hoy, dans les Orcades, sont des lieux d’observation privilégiée des mouettes pillardes. La Hermaness National Nature Reserve, dans les Shetlands, sert d’habitat à 50 000 macareux.

Vous rêvez d’apercevoir des mammifères marins ? Baleines et dauphins sont visibles dans le Moray Firth. Des excursions en mer sont régulièrement programmées par le Scottish Dolphin Centre. On y croise aussi phoques et marsouins. Les eaux de la côte ouest et des îles Orcades et Shetland sont peuplées d’environ vingt espèces de baleines dont la baleine à bosse et le cachalot. Vous pourrez aussi observer les dauphins et les phoques grâce à des excursions proposées au départ d’Inverness, ou encore admirer l’effort des saumons qui remontent les rivières au nord de la capitale des Highlands, dans des sites comme Falls off Shin.

Dans les collines et les glens vivent le chat sauvage et la martre des pins. Lièvres et lagopèdes des Alpes dévalent quant à eux les vallées des Highlands. Au nord, les régions tourbeuses sont émaillées de petites mares qui servent d’habitat à une grande variété d’oiseaux aux noms poétiques : lummes, catmarins, chevaliers aboyeurs, pluviers dorés, bécasseaux variables et busards saint-martin.

Quelques curiosités amusantes sont à signaler aux naturalistes : la frontière entre les colonies d’écureuils roux et gris, marquée notamment à Callander. Si d’un côté, au sud d’une ligne traversant l’Écosse en diagonale, cohabitent les deux races, le nord est la forteresse des écureuils roux, d’ailleurs protégés, car en voie de disparition. Enfin, le castor a remis les pattes en Écosse ! Depuis 2009, ils sont de retour dans la région de l’Argyll, et plus précisément dans la forêt de Knapdale. Le centre d’information de Barnluasgan lui est dédié et propose une observation ludique à travers le « Beaver Detective Trial » : une randonnée facile sur les traces de ces rongeurs-bâtisseurs.

Enfin, ce n’est pas parce qu’ils ne sont pas rares qu’il ne faut pas leur faire honneur ! Les cerfs, daims et chevreuils sont partout en Écosse. Vous croiserez le red deer en hardes à Glencoe ou dans les Highlands.

Safari vaches, veaux et surtout… moutons !

Ils n’ont rien de sauvage, quoique… mais vous vous amuserez tout autant à les observer et à les photographier. Il s’agit des moutons Blackface (ou Scottish Blackface) et des emblématiques Highland cows. Terre d’élevage, l’Écosse peut aisément compter, par endroit, plus de moutons que d’habitants. Le mouton est à l’origine des grands symboles culturels d’Écosse. Sa laine permet de tisser le tartan, donc les kilts. C’est sa peau qui est utilisée pour fabriquer les cornemuses traditionnelles. Sa viande est mangée en plats classiques (côtelettes, gigots, etc.), mais surtout en plat national, avec le fameux haggis… : la panse de brebis farcie aux cœur, foie et poumon de mouton et agrémenté d’un savant mélange d’épices.

Le premier passage d’un « cattle grid » surprend. Ces passages sur une grille au sol ne paraissent rien à une voiture, mais pour une vache, un mouton ou un cheval, c’est une tout autre histoire. Impossible pour eux de franchir cette limite ! Par contre, dans les centaines d’hectares situés à l’intérieur de ces points de passages, ils sont libres d’aller et venir ou ils veulent, comme bon leur semble, y compris de faire la sieste ou des premiers pas d’agneau groggy sur la route. Vous passerez donc au cœur de ces landes savamment entretenues par les moutons Blackface et les vaches Highland avec prudence pour n’effrayer ni ne blesser aucun animal. Certains éleveurs vous préviennent même, à toutes fins utiles, que les agneaux ne connaissent pas le Code de la route.

Randonneurs, il vous arrivera aussi de pénétrer ces territoires. Outre le passage sur le cattle grid (beaucoup plus périlleux qu’il n’y paraît quand on est assis dans son auto), vous vous verrez soumis à différents tests psychotechniques à l’épreuve des moutons. À chaque barrière ou presque son fonctionnement et son ouverture : parfois quelques marches, parfois un loquet à actionner, parfois un tourniquet… À croire que les éleveurs s’amusent aussi à tester l’intelligence et le sens pratique des humains qui arpentent les pâturages de leurs bêtes !

Quelques consignes sont à respecter quand on pénètre ces terres d’élevage. Les chiens sont à tenir en laisse, afin qu’ils n’effraient pas les animaux et surtout, qu’ils ne les blessent pas. Un mouton apeuré peut provoquer une scène de panique dans tout un troupeau. Les éleveurs déplorent hélas! trop souvent des attaques de nos carnivores domestiques qui, instinct oblige, peuvent parfois être pris d’un coup de folie sanguinaire. Les humains aussi prendront soin de respecter le calme des animaux, de ne pas tenter d’approches même pour de pacifiques caresses (encore moins sur les agneaux, sous peine de représailles musclées de brebis au caractère bien trempé !).

À chaque saison, à chaque mois, une Écosse différente

Enfin, amateurs de faune et de flore, chaque saison a ses atouts. Le printemps est propice à l’attendrissement devant les agneaux nouveau-nés et l’émerveillement devant les parterres de jonquilles (avril) ou jacinthes des bois (mai) ou les explosions florales des rhododendrons (juin). L’automne laisse place à de formidables camaïeux de couleurs rouille et à l’observation des saumons remontant les rivières.