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Mais comment cette pratique s’est-elle développée selon les zones géographiques ?

L'environnement exerce une grande influence sur la fauconnerie et façonne les variantes locales de la pratique traditionnelle. Par exemple, dans les déserts d'Arabie, le terrain découvert permet de faire voler des faucons qui parcourent de longues distances, et les steppes d'Asie permettent de faire voler à la fois des faucons et de grands aigles. En revanche, dans les régions boisées et les terres cultivées semi-découvertes, comme celles de la majeure partie de l'Europe, du Japon, de quelques parties de la Chine et de la République de Corée, l'usage des oiseaux de bas vol, à l'instar des autours et des éperviers, est préféré.

La communauté des fauconniers

Un lien d'almkhuwa (fraternité, EAU) ou al-shareek (éthique liée à la notion de partenariat, Arabie saoudite) gouverne la conduite des fauconniers. Almkhuwa signifie le lien de compagnonnage et de partage égalitaire des tâches, du coût et des responsabilités pendant une partie de chasse. Il s'agit habituellement de groupes de six à douze fauconniers partant en excursion pour une période d’une à trois semaines. Après un jour de chasse, ils se rassemblent autour d'un feu de camp et racontent des histoires ou des anecdotes sur le jour qui vient de s'écouler, en composant souvent des poèmes. Pour le groupe de l'almkhuwa, la fauconnerie est un moyen de savourer une tradition culturelle qui célèbre l'esprit de camaraderie dans le désert.

Dans la fauconnerie arabe, le fauconnier prononce le nom de Dieu devant l'oiseau ou l'animal pris par son faucon. Les fauconniers emmènent leurs enfants dans le désert et leur enseignent la manière de maîtriser le faucon et d'élaborer une relation de confiance avec un oiseau qui fait souvent partie de la famille. C'est un long processus qui amène le faucon à reconnaître la voix du fauconnier. Ce processus comporte également l'approfondissement de savoir-faire comme l'art de nourrir et porter son faucon sur le poing, ou d'appeler le faucon en faisant tourner un leurre.

Les faucons

Les faucons font partie de la famille des falconidés. À l’état sauvage, ils peuvent vivre jusqu’à 20 ans, et un peu moins en captivité. Les variétés prisées par les fauconniers sont des « chasseurs » et leur choix dépend de la proie qui est visée. Aux Émirats, ce sont surtout les faucons pèlerins qui migrent dès la fin de l’été depuis la Sibérie vers la péninsule arabique et qui étaient dressés pour chasser entre autres l’outarde houbara. Les faucons sont munis de grandes ailes effilées, ils sont rapides et capables d’effectuer de longs vols de poursuite en altitude : ils sont utilisés pour cela dans la chasse de haut vol. Dans celle-ci, la pratique du vol consiste pour le fauconnier à lancer son faucon sur une proie déjà dans les airs, ce qui donne lieu à de spectaculaires poursuites dans le ciel notamment lorsque la proie cherchant à se réfugier au sol, le faucon fond sur elle en piqué à plus de 300 km/heure pour les faucons pèlerins. Le rapace peut aussi se saisir de sa proie en vol ou la projeter au sol en la heurtant violemment de ses serres. Sa vitesse et son habilité sont sans pareil. Les faucons sauvages font face aujourd'hui à de nouveaux périls tels les pesticides, les fils électriques non isolés, la dégradation et la perte de leur habitat, ce qui réduit leur population. Les fauconniers s'efforcent d'assurer le maintien de ces populations au niveau national et international. Ainsi, le programme Sheikh Zayed pour la mise en liberté des oiseaux, lancé en 1995, poursuivra son entreprise de réintroduction des faucons dans leur environnement naturel en Asie. Le programme a déjà permis la libération de plus de 2 000 faucons. En Mongolie, un programme de nidification artificielle à grande échelle pour les faucons pèlerins, qui soutiendra également les communautés pastorales, est mis en place avec l'aide des EAU et l'accord de CITES.

La fauconnerie aux Émirats arabes unis

Depuis 1978, la chasse est interdite aux Émirats, et il est illégal d’attraper des faucons en liberté. On estime que 20 % de la population locale possède un ou plusieurs faucons. Ceux-ci proviennent tous d’élevages en Espagne, Allemagne, Canada, pour n’en citer que quelques-uns. Dès l’automne, au moment du début de la saison de la chasse ; les voyages s’organisent en dehors du territoire vers l’Azerbaïdjan, la Mongolie, l’Afghanistan, le Maroc. Les Émirats furent d’ailleurs le premier pays au monde à créer un passeport pour les faucons, à les laisser voyager en cabine avec un siège aménagé, et à fonder à Abu Dhabi le premier hôpital dédié au rapace, qui reste le plus grand au monde. Aujourd’hui, la fauconnerie aux Émirats arabes unis est devenue un véritable sport national, encouragé par les souverains. À Dubaï, des compétitions sont organisées régulièrement, tel le populaire Fazza Championships for Falconry, avec ses courses de faucons. Comme tous les sportifs, les rapaces subissent un entraînement de plusieurs mois avant de pouvoir y participer.

Chez les Émiratis, le faucon est associé aux valeurs de la camaraderie et du courage. La pratique de ce sport leur permet de faire vivre l’héritage et les traditions de leurs pères, dans un pays qui a été propulsé en quelques années vers la richesse et le monde moderne. Le faucon est présent dans toutes les interactions du quotidien :  Billets de banque, en-tête des ministères, cartouches des numéros d’autoroute, sur les permis de conduire, et sur chaque page des passeports émiratis. La fauconnerie, loin de s’éteindre, vit un âge d’or.