Rurutu, île native de Taaria Walker © missionnaires tahiti - shutterstock.com.jpg
Bougainville, personnage historique dépeint dans le roman Lettre à Poutaveri de Louise Petzer © gameover2012 - iStockphoto.com.jpg

Quelques auteurs d’hier et d’aujourd’hui

Commençons par Raymond Jacquet, journaliste, romancier et essayiste né le 28 septembre 1917 à Paris. Une escale prévue pour quelques semaines à Tahiti se prolonge de quelques années. Son passage sur l’île lui permet de fonder le premier journal indépendant de la Polynésie française, le Courrier des EFO. Pour que la population autochtone prenne conscience des réalités politiques, il dénonce, entre autres, les abus commis par les administrateurs coloniaux. Il écrit de nombreux romans sous différents pseudonymes : Jean-Raymond Jaureguia, Vaema Teikimatua, Nicolas Champel, ou sous son pseudonyme de journaliste Ambroise Yxemerry. Voici quelques-uns de ses romans à découvrir : Marins en campagne (1941), Services à la mer (1941), L’Ange et la femme 1946), Une fille dans les vignes (1956) ou encore La Tavana (1985). Raymond Jacquet est considéré comme un visionnaire.

Arrêtons-nous à présent sur Taaria Walker, appelée également Pare, née sur l’île de Rurutu en 1930. Elle a écrit en 1999 un ouvrage, Mémoires d’avenir d’une île australe, dans lequel elle évoque les coutumes de son île d’hier et d’aujourd’hui. Légendes et histoire se mêlent avec brio avec ses propres souvenirs. C’est un véritable témoignage littéraire construit tel un patchwork, livre devenu depuis un incontournable de la littérature polynésienne. 

La première moitié du XXe siècle salue également la naissance de Marie-Claude Tessier, née à Hyères en 1939 d’un père tahitien. Sa vie est faite de voyages, de départs et de retours à Papeete. Dans les années 1980, alors qu’elle travaille pour l’Unicef, elle rédige des livres bilingues français-anglais sur l’éducation à la santé à l’école. Parallèlement, elle écrit une biographie sur le peintre Nicolaï Michoutouchkine, et c’est surtout à partir de la fin des années 1990 qu’elle s’engage dans une vie littéraire. Elle s’investit tout d’abord dans la promotion de la littérature locale avec la création de la revue Litterama’ohi, puis, en 2004, paraît son roman autobiographique Hutu Painu : Tahiti, racines et déchirements. Elle y retrace sa vie de petite fille métisse qui doit s’adapter à différents modes de vie. En 2006, elle publie le roman Atea Roa, Voyages inattendus où humour et tendresse se rencontrent au chemin de ce Pacifique tant aimé !

Les femmes ne sont décidément pas en reste en Polynésie française, en témoigne l’œuvre de Flora Aurima-Devatine. Née en 1942 à Taurita, une presqu’île de Tahiti, elle est membre de l’Académie tahitienne et a été professeure, chercheuse et écrivaine. Elle a écrit, entre autres, des poèmes traditionnels en tahitien et d’autres poèmes en français. Pour ceux qui souhaitent la découvrir, il est appréciable de lire Vaitiare, Humeurs (1980), Tergiversations et rêveries de l’écriture orale (1998) ou encore Au vent de la piroguière (2017) pour lequel elle a reçu le Prix Heredia de l’Académie française.

Nous pourrions également évoquer Louise Peltzer, née en 1946 sur l’île de Huahine. Cette docteure en linguistique et professeure des Universités, est depuis 1998 ministre de la Culture et de l’Enseignement supérieur. En 1985, elle écrit Légendes Tahitiennes et un recueil de poésie Chant-Le besoin de lumière (Pehepehe – Te Hia’ai-ao). En 1993, elle publie un autre recueil intitulé Chant – La persévérance dans l’effort (Pehepehe – Tutava). Deux ans plus tard, sort en français Hymnes à mon île. La même année, sort sa plus grande œuvre Lettre à Poutaveri. Ce roman historique – hommage à Bougainville – met en scène l’arrivée des missionnaires à Tahiti et évoque également le passage de l’oral à l’écrit.

Citons également la métropolitaine Chantal Kerdilès et ses romans Itinéraire polynésien (1995), Voyance sous les Tropiques (1997), Yucca City Blues (2004). L’autrice trouve sa source d’inspiration à Tahiti et de façon générale en Polynésie.

Michou Chaze – elle aussi amoureuse de son île – est née à Papeete en 1950 d’un père métropolitain et d’une mère tahitienne. Elle a écrit des recueils de nouvelles comme Vai la rivière au ciel sans nuages (1990) ; Où vont les oiseaux quand il pleut (2000) ; La Ballade de Hambo (2000) et aussi un recueil de poésie Toriri (2000). Celle qui a été élevée comme une Tahitienne teinte ses écrits de tristesse et du regret du Tahiti qu’elle a connu.

L’Île des rêves écrasés (1991), Hombo, transcription d’une biographie (2002), Elles, terre d’enfance, roman à deux encres (2011) sont, quant à eux, des œuvres de Chantal T. Spitz. Son écriture s’inspire de l’oralité. L’autrice lutte également contre le néo-colonialisme. Elle travaille avec son soin son écriture et manie la langue et les formes avec originalité.

Du côté des hommes, citons Alex du Prel, né en 1944 aux États-Unis et naturalisé français en 1983. Cet écrivain aventurier a découvert la Polynésie au gré de ses traversées à la voile. Il est le directeur du magazine Tahiti-Pacifique. À lire de lui des recueils de nouvelles : Le Bleu qui fait mal aux yeux et autres nouvelles inédites (1988), Le Paradis en folie (1989), La Fragilité de l’innocence (1994).

Mais aussi Moetai Brotherson né en 1969 à Tahiti. De multiples origines coulent dans ses veines et lui offrent une grande richesse et ouverture d’esprit. Après des études d’ingénieur, il s’installe à New York et décide de revenir à Tahiti après les attentats de 2001. Même s’il manie la plume depuis son adolescence, c’est en 2007 qu’il publie son premier roman Le Roi absent dans lequel il écrit dans la tradition de l’oralité polynésienne. Tout comme Chantal Spitz, il souhaite à travers ses écrits donner la parole au peuple polynésien. L’un de ses combats est en effet de voir son archipel libéré.

Pour finir, évoquons une jeune autrice née en 1983 à Papeete : Nathalie Heirani Salmon-Hudry. En 2012, elle évoque son histoire dans le roman Je suis née morte. Elle y raconte en effet l’erreur médicale qui l’a rendue handicapée à vie, mais aussi sa vie, ses tristesses comme ses bonheurs. Un émouvant témoignage !