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Un archipel dans le puzzle de l’océan Indien

Située dans l’hémisphère sud, entre l’équateur et le tropique du capricorne, l’île de Mayotte fait partie de l’archipel des Comores qui est composé de trois autres îles : Grande Comore, Mohéli et Anjouan. Les trois îles forment désormais les Comores indépendantes, réunies en un Etat nommé Union des Comores. Mayotte a, quant à elle, décidé de rester française en 1975 et est aujourd’hui un département de la République française. Mayotte se trouve dans la partie ouest de l’océan Indien entre l’Afrique et Madagascar à l’entrée nord du canal du Mozambique au niveau du 45° méridien et entre les 12° et 13° parallèles sud. L’île Hippocampe se trouve à 8 000 km de Paris, 1 500 km de la Réunion, 400 km de la côte est de l’Afrique et à 300 km de la côte occidentale de Madagascar. D’une superficie de 374 km2, Mayotte comprend deux îles principales et habitées, Petite-Terre et Grande-Terre, ainsi qu’une trentaine d’îlots épars.

Des îles sorties des flammes

Comme les autres îles des Comores, « l’Hippocampe mahorais » est d’origine volcanique. Il a été formé par l’éruption de volcans sous-marins venus percer la surface des eaux. Explications : le plancher océanique se déplace, au gré de quelques millimètres par an ; en dessous, le magma forme par endroit des points chauds qui percent le plancher sous-marin en pointillés. Le magma, masse de roches en fusion comme le basalte compact, noir et lourd, forme des montagnes sous-marines posées sur le fond des plaines abyssales, qui s’élèvent parfois plus haut que l’océan pour créer des îles. Après leur naissance violente, éruptive, les volcans s’éteignent, puis meurent. Sous le poids des âges, ils commencent à s’affaisser, s’enfoncer, la dérive océanique les emportant. L’érosion du vent et de la mer les écroule, les montagnes volcaniques s’érodent et se parent rapidement de végétation. Selon le niveau de maturité du volcanisme, l’île est passée par trois types d’activités volcaniques : de type hawaïen à laves basaltiques fluides, puis strombolien à cônes et projections de lapillis et, enfin, activité explosive avec lacs de cratère, dite ultra-vulcanienne ou phréato-magmatique. Ainsi, Mayotte possède quelques traces bien visibles de ces volcans désormais éteints comme le lac Dziani en Petite-Terre ou bien le mont Choungui au sud de Grande-Terre.

Mayotte la doyenne

Ce point chaud de la tectonique des plaques a formé d’abord Mayotte, la plus ancienne, il y a huit millions d’années, puis a continué à se déplacer et à créer les autres îles comoriennes. Mayotte, logiquement en tant que doyenne, est la plus érodée et la moins élevée des îles de l’archipel. Son relief est moins accentué que celui de ses sœurs comoriennes et a été soumis à un enfoncement important, son plateau s’étant progressivement effondré. Mayotte s’élève donc des profondeurs océaniques de plus de 3 000 m pour culminer à 660 m. Elle possède un lagon, et quel lagon ! Avec plus de 1 100 km², c’est un des plus grands et des plus riches du monde qui est enserré au milieu d’une barrière de corail de 160 km de long presque continue, coupée par une dizaine de passes. Il peut atteindre 70 m de profondeur. Les 374 km2 de terres émergées se répartissent entre Petite-Terre (11 km²) et Grande-Terre (363 km²), et quelques îlots parsemés alentour. Petite-Terre est à l’extrême est, très proche de la fin du lagon et donc de l’océan, tandis que Grande-Terre est en plein milieu du lagon. Au point le plus proche de ces deux îles, un bras de mer (ou plutôt de lagon) de 2 km de large.

Mayotte, un atoll en devenir

Mayotte présente des reliefs doux, des plaines assez vastes et des plages de sable ocre, ainsi que des îlots de sable blanc corallien. Comme toutes les îles volcaniques et tropicales, Mayotte vit une histoire qui n’excédera pas les 100 millions d’années en tout. Eh oui, traces dérisoires à l’échelle du temps, ces îles sont mortelles et ne survivront pas, à l’inverse des continents. Mayotte, qui est la plus ancienne, en est encore à un stade intermédiaire, proche du stade qu’atteint Maurice. Dans quelques millions d’années, ces récifs se couvriront de sable corallien, comme l’îlot de Sazilé, et feront tout le tour de l’île à l’image de Bora Bora en Polynésie. Pour l’instant, Mayotte présente plutôt la configuration, très rare, d’une île comme celle de Mangareva, en Polynésie, avec une petite terre émergée au milieu d’un immense lagon aux contours submergés. Plus tard encore, l’île centrale disparaîtra sous les eaux, ne laissant plus émerger qu’une couronne d’îlots de sable blanc : ce sera un atoll, comme on peut en voir aux Maldives, aux Seychelles, et dans tout le Pacifique…

L’archipel sous les secousses

L’année 2018 aura été une année marquante pour Mayotte : sur terre les protestations agitent la population, mais sous terre le sol s’agite aussi mystérieusement : 1 600 tremblements de terre ont été enregistrés en l’espace de dix mois. Un record absolu pour l’archipel jusqu’alors plutôt paisible. Si la plupart des secousses étaient de faible intensité, une trentaine d’entre elles ont atteint ou dépassé 5 sur l’échelle de Richter, fissurant certaines maisons et fragilisant des établissements scolaires, comme ce fut le cas au collège de Dembéni. En parallèle, un autre phénomène s’accélère brutalement : l’affaissement de l’archipel, principalement sur sa façade est. En un an Petite-Terre se serait enfoncée dans la mer de 8 à 12 cm ! Un phénomène naturel mais d’une rapidité déconcertante : habituellement l’île perd seulement 0,19 mm par année. Le coupable est heureusement vite démasqué : il s’agit d’un volcan sous-marin situé à 50 km à l’est de Mayotte, à 3 400 m sous la surface, qui s’est formé petit à petit avant d’entrer en éruption. La mission scientifique volcanique « Tellus Mayotte », coordonnée par le CNRS, a été lancée en février 2019 pour étudier le phénomène, révélant que l’apparition du volcan a également provoqué un déplacement significatif de l’archipel vers l’est. Les missions scientifiques se succèdent depuis, les outils de pointe permettant d’obtenir des images et données très précises sur ce volcan, connu désormais comme le 4e volcan actif de France. Fin 2019 les secousses ne se font plus sentir, on pourrait croire à un retour à la normale mais les scientifiques mettent en garde : le volcan est toujours actif ! De grandes questions restent en suspens, comme l’impact de cette éruption sur la vie marine. Affaire à suivre.