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Une affaire de bosse et de thermorégulation

D’allure lymphatique un tantinet hautaine, le dromadaire peut peser jusqu’à une tonne selon les races (plus généralement 300 à 550 kg pour les femelles et 400 à 600 kg pour le mâle) et atteindre 2,5 mètres au garrot. A contrario des chameaux (cha-meau = 2 syllabes = 2 bosses) qui s’ébattent dans les régions à fortes variations climatiques de l’Asie où il vaut mieux être doublement paré pour survivre, il ne possède qu’une seule bosse dont le volume varie en fonction de son état nutritionnel. Contrairement aux idées reçues, celle-ci, une grosse boule de chair que ne soutient aucun os, ne sert pas à stocker de l’eau, mais de la graisse, afin de limiter la sudation qui est la principale cause de déshydratation en milieu sec. Ainsi localisés, les amas graisseux ne se disséminent pas dans le reste du corps. Moins gras, l’animal se refroidit mieux. Le métabolisme particulier du camélidé fait le reste et se charge de transformer cette graisse en eau et en énergie. Véritable réserve ambulante, la bosse permet au dromadaire de parcourir jusqu’à 60 kilomètres par jour et de survivre jusqu’à quinze jours de suite sans boire ni manger. Cette faculté est renforcée par d’autres atouts qui limitent la transpiration : un pelage clair et épais qui réfléchit les rayons du soleil, des glandes sudoripares en nombre limité, une aptitude assez extraordinaire à thermoréguler la température interne du corps en fonction de la température extérieure. Alors qu’un tel niveau de variation serait mortel chez bien d’autres animaux, le dromadaire peut abaisser sa température corporelle jusqu’à 34° durant les heures fraîches de la nuit et l’augmenter jusqu’à 42° aux heures les plus chaudes du jour, économisant de la sorte des litres d’eau précieuse. Le dromadaire peut aussi supporter une perte hydrique supérieure à 30 % qui serait fatale chez les autres mammifères. En parallèle, il est capable de se réhydrater à grande vitesse et d’ingurgiter l’équivalent d’un tiers de son poids (largement plus de 100 litres d’eau) en 15 minutes !

Une morphologie taillée pour les environnements arides

La physiologie globale du dromadaire est elle aussi particulièrement adaptée aux zones sèches comme le désert. Un os crânien large et volumineux situé au-dessus de chaque œil fait office de visière tandis qu’une double rangée de cils très longs et bien fournis empêche le sable de toucher les yeux ; pour parfaire le tout, une troisième rangée de cils joue le rôle d’un petit « balai » afin d’essuyer la surface oculaire de gauche à droite. Les narines, quant à elles, peuvent se fermer complètement pour empêcher le sable de pénétrer à l’intérieur évitant ainsi l’assèchement de la muqueuse nasale. Elles sont séparées par une petite gouttière qui permet de diriger l’humidité rejetée par les naseaux directement vers la bouche. Haut sur pattes, le dromadaire tient son corps éloigné de la chaleur du sol. Ses pieds larges et souples, dépourvus de sabots, mais dotés de coussinets élastiques prolongés de deux ongles cornés (ou soles plantaires) facilitent la marche sur des terrains mous et sablonneux à la façon d’un pneumatique. Des cals protègent les genoux et toutes les parties du corps susceptibles d’entrer en contact avec le sable brûlant (en cas de position allongée, par exemple). En matière d’alimentation, le dromadaire se distingue aussi des autres ruminants domestiques. Ses lèvres épaisses optimisent la préhension des plantes les plus grossières tandis que son système de digestion lui permet de se contenter de fourrages nutritionnellement assez pauvres. Son régime alimentaire est diversifié et comprend même des plantes à forte teneur en sel rejetées par tous les autres herbivores. En cas de pénurie extrême, le dromadaire peut aussi aller jusqu’à se nourrir de poisson, de viande, d’os ou de peau. Sacré vaisseau des sables !

Les dromadaires du sultanat

Mais où croiser des dromadaires à Oman ? Globalement partout, dès lors que l’on s’éloigne des villes et que la nature reprend ses droits – y penser quand on conduit soi-même et qu’on traverse des espaces désertiques. Absents des montagnes, les camélidés s’épanouissent dans les plaines sableuses,  en bord de mer (notamment dans la région du Dhofar) et surtout, bien sûr, dans les déserts qui occupent la majeure partie du territoire. Contrairement à ce que l’on pourrait penser, très peu de ces camélidés sont sauvages même quand ils semblent vaquer librement dans des espaces vides et isolés. Ils appartiennent à des fermiers ou éleveurs qui vivent soit aux abords du désert, soit à temps partiel entre le désert et la ville. Autrefois utilisés pour le transport de marchandises à travers les sables, désormais remplacés par des véhicules tout-terrain puissants, les dromadaires à l’instar de leurs propriétaires, ont tendance à se sédentariser et à être surtout utilisés comme animaux d’élevage pour leur viande, leur fourrure, leur peau, etc. Comme partout ailleurs, on distingue plusieurs races à Oman dont certaines peuvent valoir des fortunes. C’est le cas des dromadaires de monte ou de course particulièrement prisés des notables du pays et notamment des hauts dignitaires qui, en plus de chevaux d’exception (l’autre grande passion locale), possède des « haras » de dromadaires.

Des coursiers hors pair

Partie intégrante de la culture traditionnelle locale, les courses, c’est une spécificité du monde arabe, sont un véritable sport national. Elles sont très prisées des Omanais, et contribuent à la fois au folklore et au tissu social. Elles se déroulent pendant la saison douce, de septembre à mars, plutôt les week-ends et jours fériés, et se tiennent dans des camélodromes aménagés dans des espaces ouverts à l’extérieur des villes. Chaque année a ainsi lieu un National Camel Race Festival – voir le site www.omanobserver.om pour les dates. Les camélidés peuvent y atteindre de grandes vitesses, jusqu’à 65 km/h pour les meilleurs d’entre eux (comparativement, un cheval peut courir jusqu’à 88 km/h en course). En plus de faire le lien avec les traditions identitaires, les courses sont un business à part entière avec des fermes d’élevage, des pistes d’entraînement, un corps professionnel spécifiquement dédié à cette discipline (éleveurs, dresseurs, acheteurs, vétos…).