A l'heure où notre dernier voyage commence à dater et le prochain n'est malheureusement plus à l'ordre du jour, quelques grands classiques permettent heureusement de voyager depuis son canapé. L'occasion de dépoussiérer les ouvrages qui traînent dans sa bibliothèque ou de se commander quelques ebooks sur Internet pour passer le temps tout en respectant le confinement. Le Petit Futé vous propose donc une plongée dans les oeuvres d'auteurs qui nous ont fait voyager. Après avoir suivi les traces d'Hergé et son célèbre reporter Tintin, du regretté Albert Uderzo en Gaule, comme dans le reste du monde, accompagné Jules Verne ou Ernest Hemingway aux quatre coins de la planète, place au cinquième auteur de notre série : Jack London.

San Francisco, Oakland et la Californie, le port d'attache

C'est évidemment aux Etats-Unis que se déroulent un grand nombre des oeuvres de Jack London (1876-1916), qui est né en Californie à San Francisco. Mais sa maison natale du 615 3rd Street a brûlé lors du tremblement de terre de 1906, qu'il décrit dans plusieurs journaux nationaux, et sa famille s'est installée ensuite à Oakland, de l'autre côté de la baie peu de temps après. Après avoir travaillé dans des usines à 14 ans, avoir été pilleur d'huîtres et garçon de cabine sur un voilier, il réussit à faire des études à l'université de Berkeley. Les nouvelles qu'il publie par dizaines sur les conditions de vie de son époque le rendent célèbre dans toute l'Amérique, dès l'âge de 25 ans. Il décrit notamment les conditions rurales et ouvrières du début du XXe siècle dans plusieurs ouvrages comme The Iron Heel ou Martin Eden. Il prend plaisir alors à écrire des nouvelles de mille mots et s'arrête donc, parfois, au milieu d'une phrase ! La notoriété de Jack London devient mondiale après la publication de L'Appel de la forêt (1906) et Le Loup des mers (1904).

Sur le port d'Oakland, le Jack London Square est l'attraction touristique principale de la ville. Un circuit sur les traces de Jack London vous emmènera faire un petit circuit dans le quartier et vous mènera notamment face à la statue grandeur nature de l'écrivain qui admire le bord de mer. Sous les palmiers est reconstituée la véritable cabane en rondins qu'il habita quelques mois à Henderson Creek, au Canada. Les rondins ont été transportés depuis le Yukon jusqu'ici. Non loin, le Heinold's First and Last Chance Saloon (le saloon " de la première et dernière chance ") existe toujours et conserve la table de travail de l'écrivain. La balade autour de Jack London s'arrête au pied d'une autre statue, celle du fameux loup blanc.

De l'Alaska au Yukon, la ruée vers l'or

Pour marcher sur les traces de Jack London, direction l'Alaska, l'un des derniers paradis naturels que compte notre belle planète. Sommets enneigés à perte de vue, forêts immenses, toundra vibrant sous les sabots de caribous, loutres se faufilant entre les baleines au pied d'immenses glaciers, aigles à tête blanche scrutant les rivières, la nature y est forte et sans limites.

Et en évoquant l'Alaska en littérature, on pense immédiatement à Jack London qui a si bien su retranscrire l'ambiance de la ruée vers l'or de la région du Klondike. Même si les aventures se passent dans le Yukon canadien tout proche, Jack London a sillonné une partie de l'Alaska.

En 1897, il arrive en Alaska par le passage intérieur entre la Colombie-Britannique pour rejoindre Dyea. Là, London se prépare à franchir le col du Chilcoot, avec une tonne d'équipement sur le dos, qu'il transporte par paquets dans des marches épuisantes. Arrivé au lac Bennett en territoire canadien, London, avec des camarades de rencontre, construit deux bateaux (Yukon Belle et Belle of Yukon) avec lesquels il descendra le fleuve Yukon, jusqu'à Dawson City, franchissant les rapides et essayant de gagner de vitesse l'hiver qui arrive. La Belle of Yukon arrive à Stewart River, avec London à son bord. Il délimite un claim, une " concession ", à Henderson Creek. Ce claim ne semble pas lui avoir rapporté beaucoup d'or. Jack va ensuite habiter Split-Up Island. A Dawson, London a de nombreuses conversations avec les " vieux de la vieille " dans les bars. Il entend alors une foule d'histoires qui lui serviront plus tard à écrire parmi ses plus célèbres romans (L'Appel de la forêt, Croc-Blanc, Les Enfants du froid, Belliou la fumée, Le Fils du Loup, etc.). Dans la cabane où il vit, il rencontre même le chien Jack, futur modèle de Buck, le héros de L'Appel de la forêt. Il passe aussi l'hiver au camp de mineurs de Stewart River. Atteint du scorbut, il descend ensuite la Yukon River jusqu'à St. Michael, près de Nome en Alaska, dans le but de rentrer à San Francisco pour échapper à la maladie. Il atteint finalement Frisco après s'être embarqué comme chauffeur sur un vapeur, le Bartlett.

Entre réalité et fiction, ses livres permettent donc de se plonger dans cette époque fascinante qui a tant marqué l'Etat. Aujourd'hui encore, Dawson City est une étape incontournable si l'on traverse le Yukon. On pourra notamment y visiter le Jack London Museum où un historien passionné raconte la vie de l'auteur. La cabane en rondins que l'on peut voir est une réplique de celle de l'écrivain qui se situait à Henderson Creek, à 120 km au sud de Dawson City. L'auteur y avait gravé son nom : " Jack London. Miner, author, Jan 27, 1898. "

Croisières aux confins du monde

Puis, en 1902, Jack London va découvrir l'Europe. Il va vivre pendant quelques mois à Londres dans l'East End, un quartier pauvre de la capitale britannique, avant d'embarquer pour la Corée où il fera un reportage sur la guerre russo-japonaise.

L'auteur américain va aussi entreprendre un tour du monde sur son navire le Snark. Il va traverser les mers du Sud et en faire un récit : La Croisière sur le Snark (1911). Il découvre Honolulu à Hawaï, Nuku Hiva aux Marquises, Bora-Bora, les Îles Samoa, avant de terminer son périple en Mélanésie (Archipel des Fidji, Nouvelles-Hébrides, Îles Salomon). Des îles qui seront le cadre de récits et romans comme L'Aventureuse (1911), Jerry, chien des îles (1917), Michaël, chien de cirque (1917) ou (pour partie) Martin Eden (1909).

Retour en Californie et Vallée du vin

Au nord du Golden Gate Bridge et de Marin County, c'est la Vallée du Vin qui s'étend entre les vallées de Napa, Sonoma et Russian River. Sonoma, la plus proche de San Francisco, est à une heure à peine du Golden Gate Bridge et c'est là, après plusieurs années de vagabondage, que Jack London décide de jeter l'ancre à la fin de sa courte vie. Il s'isole alors dans un ranch de Glen Ellen, un village paisible dans la vallée de la Lune. Il y meurt à l'âge de 40 ans et y est enterré.

On ne manquera pas de visiter le Jack London State Historic Park. Un pèlerinage sur les traces de l'auteur qui nous amène sur les ruines de la maison qu'il construisit avec sa femme, mais qu'ils n'habitèrent jamais. Maison de ses rêves où il souhaitait finir ses jours, Jack London investit toute sa fortune dans la construction de cette villa. Il l'appela Wolf House, de son propre surnom tiré de son premier succès littéraire, Croc-Blanc. Malheureusement, la maison brûla juste avant l'emménagement. Les London n'eurent pas la force de la reconstruire, mais décidèrent d'habiter dans un autre cottage sur la propriété. Un musée retrace la vie passionnante de l'écrivain. Avant de partir, on se recueillera sur la tombe de l'écrivain, un simple roc posé sur la terre et l'on profitera bien sûr de l'une des plus jolies bourgades de la vallée du vin.