Le Piton de la Fournaise. shutterstock - Zamir Popat.jpg
Quand la route est bloquée par la lave. iStockPhoto.com - titine974.jpg
Quand la lave coule jusqu'à l'océan. iStockPhoto.com - wildacad.jpg

Entre méfiance et curiosité, l’exploration progressive du volcan

Jusqu’à la construction de la route dans les années 1960, seuls quelques aventuriers se rendaient au volcan. Objet de nombreuses légendes populaires, ses flammes étaient avant tout craintes par les habitants de l’île qui prenaient soin de garder leurs distances avec le lieu. C’est lors de l’éruption de 1977, qui ravagea le village de Piton-Sainte-Rose, que l’on commença paradoxalement à s’intéresser au volcan et à prendre conscience de la nécessité de le surveiller. Un observatoire volcanologique est alors mis en place pour détecter les moindres mouvements sous la surface. Aujourd’hui les éruptions sont signalées dès les premiers signes, et même prévisibles quelques jours à l’avance avec l’augmentation des microséismes. La lave jaillit soit dans la zone sommitale (le cratère Dolomieu), soit ailleurs dans l’enclos Fouqué, et s’écoule ensuite suivant la pente, vers l’intérieur de l’enclos ou vers l’océan. Créée en 1992 et entièrement rénovée en 2010-2014, la Maison du volcan située à Bourg-Murat est un arrêt incontournable sur le chemin du retour. Elle fournit des explications très complètes sur le fonctionnement du volcan avec sons, images, objets et une visite en 4D.

Conseils pour une meilleure observation

Désormais, lorsque la Fournaise entre en éruption, la nouvelle se répand (« Volcan la pété ! ») en quelques heures seulement et chacun prend ses dispositions pour se rendre sur place, photographier et filmer. Attention toutefois, pendant l’éruption l’accès à l’enclos est condamné par une barrière métallique. Seuls les détenteurs d’une autorisation préfectorale auront le privilège de la franchir. Écoutez la radio et renseignez-vous pour savoir quand et comment accéder au meilleur point de vue (depuis le pas de Bellecombe ou ses environs) et si la coulée descend jusqu’au littoral. Même de loin, le spectacle des fontaines de lave et du ciel rougeoyant est magnifique, surtout la nuit. Mais armez-vous aussi de patience et de gros pulls : l’affluence est grande lors d’une éruption et les pouvoirs publics doivent réguler l’accès. Les parkings sont alors pleins à craquer et l’unique route menant au pas de Bellecombe est vite saturée. Seule exception puisqu’on ne peut aller aux coulées : attendre qu’elles viennent à vous, quand elles atteignent l’océan au niveau du Grand-Brûlé (Saint-Philippe). La rencontre de l’eau et de la lave est un incroyable spectacle, fumant, bouillonnant, accessible au public, mais très rare : la dernière fois en 2007.

Les éruptions marquantes

1961. Première éruption de l’époque moderne, elle est exceptionnelle à plus d’un titre. C’est une des rares éruptions sommitales qui explosa avec un panache de cendres de 6 000 m de haut ! Elle déversa ses laves jusqu’à la mer et fut l’objet du premier embouteillage d’automobilistes venus admirer le spectacle, sur la route des Laves dans les Bas car la route du Volcan n’existait pas encore à l’époque. La lave engloutit aussi pour la première fois la Vierge au Parasol, installée depuis le début du XXe siècle et considérée comme miraculeuse pour avoir protégé les terres d’agriculteurs de Bois-Blanc.

1977. En avril, une éruption a lieu hors enclos, alors que 95 % d’entre elles se produisent habituellement à l’intérieur. Elle traverse le village de Piton-Sainte-Rose (évacué à temps), détruit des maisons et une station-service. Une coulée finit dans la mer, tandis qu'une autre s’arrête net devant l’église, ce qui est immédiatement apparenté à un miracle. Le lieu saint a ensuite été rebaptisé « Notre-Dame-des-Laves ».

1986. Le 20 mars, une fissure de 700 m de long s’ouvre au-dessus du village de Takamaka, que l’on doit évacuer. La coulée détruira huit maisons et finira sa course dans la mer, agrandissant l’île de quelques hectares au niveau de la pointe de la Table.

1998. Après un sommeil de plus de six ans, la Fournaise se réveille en grandes pompes avec une éruption qualifiée d’éruption du siècle, qui se prolonge durant sept mois ! Plus de 30 000 spectateurs viennent de toute de l’île assister au spectacle nocturne, avec pique-nique et famille.

2000 à 2003. En 2002, deux nouvelles coulées atteignent la mer, pour la première fois depuis 1986. L’une d’elles coupe la nationale au niveau de la Vierge au Parasol, heureusement déboulonnée à temps. En 2003, quatre éruptions courtes : l’une d’elles dure à peine 3h, mais c’est la première fois que le volcan emporte une vie. Un étudiant est tombé dans une crevasse formée par l'effondrement d'une voûte de lave, et depuis cette date, l’enclos est systématiquement fermé en période éruptive et pré-éruptive.

2004. Un cru exceptionnel, avec trois coulées, dont une dure près d’un mois, dont près d’une semaine à couler dans la mer. Le spectacle, mémorable, réunit encore une foule gigantesque et les embouteillages sont une fois de plus ingérables. Une plate-forme de 9 ha se forme sur la mer, agrandissant encore la Réunion. Le spectacle bat son plein, quand pour la première fois un cratère s’ouvre au niveau de la mer, phénomène qui n’arrive habituellement qu’en altitude. Des fontaines de lave cordée jaillissent à plusieurs dizaines de mètres de hauteur, tandis que les spectateurs sont évacués de la zone.

2005. La première éruption de l’année commence le 17 février de manière banale. Mais le 25, le volcan prend tout le monde par surprise en laissant dévaler ses laves à grande vitesse vers la mer et la Vierge au Parasol. À 16h, alors qu’aucune coulée n’est visible, la forêt commence à brûler. À 19h, la lave traverse déjà la RN2 et à 23h45 elle rejoint la mer. On craint une évacuation du village comme en 1977. À minuit, la Vierge au Parasol est déboulonnée pour la sauver une fois de plus. Le village n'est finalement pas évacué et l’éruption se termine le 8 mars.

2007. L’éruption du siècle ! La Fournaise se réveille en avril pour le plaisir des spectateurs. Le cratère Dolomieu s’effondre de 350 m, bouleversant le paysage sommital, inchangé depuis les années 1930. Le sentier faisant le tour du cratère est depuis interdit aux randonneurs, car trop dangereux. Les coulées exceptionnellement abondantes coupent la RN2 et se jettent dans la mer, un spectacle qui n’a plus été vu depuis. On y relèvera plus de 50 m d'épaisseur de lave et il fallut attendre presque un an pour la réouverture de la route.

2008 à 2014. Après tout ce spectacle, la Fournaise s’est assagie pendant quelques années. De petites éruptions se sont produites en 2008, 2009 et 2010, puis le calme plat jusqu’en 2014 : aucune éruption pendant quatre ans, ce qui n’était pas arrivé depuis les années 1990. En 2014, la Fournaise se réveille timidement avec une seule éruption « éclair » qui dura moins de 24 heures.

2015. La Fournaise reprend du poil de la bête avec quatre éruptions dans l‘année. Si les deux premières furent gâchées par la météo, la troisième, en juillet, était spectaculaire : des fontaines de lave hautes de plusieurs dizaines de mètres, visibles du pas de Bellecombe, par une nuit de pleine lune. Des conditions parfaites qui ont attiré la foule, en plein week-end de vacances. Beaucoup ont dû rebrousser chemin face aux embouteillages, tandis que d'autres sont quasiment tombés en hypothermie en attendant les navettes mises en place à la va-vite. En revanche, les premiers arrivés en ont pris plein les yeux. Rebelote en août avec une quatrième éruption qui dura 69 jours. Les panaches orangés étaient même visibles des côtes sud et est.

2016. Le cru 2016 est moins riche avec seulement deux éruptions ; la première a duré seulement 27 heures, pas assez pour se laisser admirer. La seconde a duré une semaine ; visible depuis le pas de Bellecombe, le spectacle a été au rendez-vous pour les chanceux… et les courageux n’ayant pas peur d’affronter les températures avoisinant 0 °C.

2017. Le volcan s’est montré généreux cette année avec trois éruptions dont deux de plus d’un mois. Le 14 juillet 2017, il offre un feu d'artifice avec une éruption visible depuis le piton de Bert qui fait le bonheur des touristes et des écoliers en vacances. Elle se termine après six semaines de spectacle.

2018. La première éruption de l'année, en avril, n’a duré que 17 heures mais la seconde, quelques jours plus tard, a duré plus d’un mois. La troisième date de juillet et a duré moins d’une journée, avec tout de même de belles fontaines de lave visibles du pas de Bellecombe. Enfin, la quatrième et dernière a eu lieu en septembre et a duré 47 jours.

2019. L’année 2019 a été particulièrement active pour le volcan avec presque une éruption tous les deux mois : elle a commencé dès le début de l’année avec une éruption le 18 février, un beau cadeau de Saint-Valentin ! Un cadeau qui durera jusqu'au 10 mars, avant de reprendre le 11 juin. Les deux éruptions étaient visibles depuis la RN2. Le 29 juillet le volcan entre à nouveau en éruption mais de l’autre côté cette fois, au niveau de la chapelle Rosemont. Facilement visible depuis le pas de Bellecombe, elle ne durera que deux jours mais sera annonciatrice d’une activité souterraine importante. En effet, dès le 11 août le volcan crache à nouveau. Rendue très peu visible les premiers jours par un intense brouillard, ses lueurs rougeoyantes apparaissent depuis la RN2 dès le deuxième jour à mesure qu’elle descend vers l’océan. Elle s’arrête le 15 août, à 2 km de l’océan. Le 25 octobre le volcan se réveille à nouveau et s’écoule à une vitesse déconcertante. En deux jours seulement la lave est à 250 m de la route nationale, fermée pour l’occasion, et le DASH est envoyé pour ralentir la progression de la lave. Touristes comme locaux sont présents en masse pour cette éruption spectaculaire et un sentier est aménagé pour aller l’observer de plus près, du jamais vu. Elle s’éteint finalement le 27, aussi vite qu’elle est apparue.

2020. Comme l’année précédente, le volcan a démarré son année sur les chapeaux de roue avec une première éruption dès le 10 février qui dure sept jours. Celle-ci a dévalé les pentes et exceptionnellement, les visiteurs ont pu s’en approcher de très près. Elle donne naissance à un nouveau cône que les scientifiques ont nommé Jacques Picard, en hommage à l’homme qui a contribué activement au développement de la connaissance du volcan. Elle est suivie par une éruption du 2 au 6 avril, que seuls les heureux détenteurs d’une attestation pourront observer, confinement oblige. Une véritable épreuve pour les passionnés qui n’auront pu voir ses lueurs que depuis leur écran d’ordinateur. À noter que cette éruption a été particulièrement intense dans ses émissions de gaz et dans la formation de cheveux de Pélé, phénomène assez rare à la Réunion. Ces filaments de lave retombent sur le sol semblables à de longs cheveux dorés que les Hawaïens attribuaient à Pélé, leur déesse du volcan.

2021. La première éruption de l'année 2021 est l'une des plus longues du piton de la Fournaise. Le volcan est entré en éruption le 9 avril, pendant le confinement (de 18h à 5h) et a pris fin le 24 mai, pour se réveiller le 22 décembre 2021 et offrir un feu d'artifice inédit pour les fêtes de fin d'année. L'éruption a pris fin le 17 janvier 2022.

2022-2023. Le piton de la Fournaise est entré en éruption le 19 septembre 2022, pour se terminer le 5 octobre. Le cône volcanique de l'éruption a été baptisé « piton Tikal », en référence aux contes et légendes de la Réunion associés à Gran Mèr Kal. Le 2 juillet 2023, nouvelle éruption, avec un début d'éruption puissant. L'activité se concentre au niveau de la fissure ouverte sur le flanc sud-est du volcan, le spectacle durera plus d'un mois. Fin de l'éruption le 10 août.