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La presqu'île de La Caravelle ©  Stan-972  - stock.adobe.Com.jpg

Une île exposée à de nombreux risques et pressions

La Martinique, au carrefour  de différentes plaques tectoniques, est soumise à un certain nombre de risques naturels : séismes, inondations, tsunamis, cyclones tropicaux, qui font l'objet d'un plan de prévention. Les activités humaines engendrent également des impacts sur les équilibres naturels. Ainsi, les pressions anthropiques (notamment l'agriculture et l'urbanisation) accentuent  l'érosion des sols, la fragmentation des milieux naturels et les pollutions. Les espèces exotiques envahissantes, comme le Miconia, constituent également une menace pour la biodiversité. L'activité touristique contribue elle aussi à la pression sur les ressources (eau, énergie) et à la production de déchets.

Des espaces pour protéger les équilibres naturels

La Martinique, qui figure parmi les « hotspots » de  biodiversité mondiale, déploie des actions afin de préserver la dynamique évolutive du vivant. La réserve naturelle nationale de la Caravelle, la réserve naturelle nationale des îlets de Sainte-Anne et la réserve marine du Prêcheur-Albert Falco ont été créées à cette fin. Une réserve biologique intégrale existe également sur l'un des versants de la montagne Pelée. Le Parc naturel régional de la Martinique vise quant à lui à concilier protection des milieux et activités économiques, au travers notamment de projets écotouristiques.

Les défis environnementaux de l'agriculture

La colonisation du territoire s'est fondée sur une agriculture intensive (culture de la canne à sucre et de la banane) et une urbanisation qui ont entraîné déforestation, dégradation des sols et pollution des milieux. Les eaux de ruissellement chargées en intrants chimiques ont également contribué à l'eutrophisation du littoral et à la fragilisation des écosystèmes marins. La contamination des milieux au chlordécone reste aujourd'hui un sujet de préoccupation environnemental et sanitaire. Cet insecticide organochloré, considéré comme persistant, fut utilisé de 1972 à 1993 pour lutter contre le charançon bananier. Son utilisation a pollué non seulement les sols mais aussi les nappes phréatiques et l'ensemble de la chaîne alimentaire. L'exposition au chlordécone est aussi un facteur de risque sanitaire. La stabilité de la molécule a pour conséquence sa rémanence dans les sols et nécessite la surveillance des zones contaminées. Une cartographie des zones polluées est mise à disposition par l'Etat. Un « plan IV chlordécone » a vu le jour pour la période 2021-2027, visant à mettre en place des actions de limitation de l'exposition des habitants au pesticide incriminé. Le territoire nord-ouest de l'île aurait quant à lui été épargné par le chlordécone. C'est là, sur la commune de Fonds-Saint-Denis, que l'on trouve notamment une agriculture biologique fondée en partie sur des savoirs ancestraux et des espèces locales et adaptées, promue par l'association L’Esprit Lasoté.

L'invasion des sargasses ou le symbole de la pollution planétaire

La Martinique est confrontée de manière épisodique à l'échouage sur ses côtes d'algues, les sargasses : Sargassum fluitans et Sargassum natans. La prolifération de ces algues brunes a des répercutions économiques directes sur le territoire (activités balnéaires et pêche) mais présente aussi des impacts environnementaux (perturbation de la biodiversité locale), et des risques sanitaires pour les personnes exposées. Ce phénomène serait lié à l'agriculture intensive en Amazonie. En d'autres termes, la déforestation massive et l'utilisation intensive d'intrants - phosphates et nitrates -  génèrent un lessivage des sols, dont les effluents se retrouvent ensuite dans le fleuve puis dans l'océan, où ils créent les conditions favorables au développement des sargasses. Les courants entraînent ensuite les algues jusqu'en mer des Caraïbes. Les brumes de sables issues du Sahara contribueraient également au déplacement des sargasses. Le réchauffement climatique, quant à lui, pourrait induire la survenue plus fréquente de ces brumes de sables.

Les défis énergétiques du territoire : sortir de la pétrodépendance

Le mix énergétique de la Martinique en 2019 mettait en exergue une forte dépendance aux énergies fossiles (essentiellement produits pétroliers importés), liées en majeure partie au secteur des transports. Le territoire a cependant commencé sa transition énergétique, conformément à la réglementation française, qui vise l'autonomie énergétique du territoire d'ici 2030. La Martinique entend notamment développer les énergies renouvelables (photovoltaïque, éolien, biomasse) et maîtriser la demande énergétique (l'installation de chauffe-eau solaire et de LED ont permis de faire diminuer les consommations). La mobilité reste un enjeu fort. Il s'agit de décarboner les transports, en favorisant le report modal de la voiture vers les transports en commun et les mobilités actives, mais aussi de développer les véhicules électriques. Parce que chaque geste compte, le voyageur est également invité à participer aux efforts de sobriété énergétique.

La Martinique face au changement climatique

Le réchauffement planétaire en cours pourrait affecter de manière forte la Martinique, notamment avec l'intensification des phénomènes extrêmes (cyclones tropicaux, inondations). La montée des eaux et l'érosion des côtes pourraient menacer non seulement les infrastructures mais l'ensemble des activités humaines, et les ressources (eau et biodiversité).

Pour une « écologie décoloniale »

Conceptualisée par le chercheur martiniquais Malcom Ferdinand, « l'écologie décoloniale » associe selon lui « l'exigence de préservation des équilibres écosystémiques de la Terre et l'exigence décoloniale ». Elle a trait non seulement aux luttes pour le climat mais aussi aux combats sociaux, féministes ou antiracistes. L'idée est d'intégrer dans la pensée environnementale « les destructions humaines ou environnementales » mises en œuvre par différentes formes de domination : impérialismes, colonisations, esclavage. Un concept en résonance avec l'histoire de la Martinique.