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Mangouste © JEAN-FRANCOIS Manuel - Shutterstock.com.jpg
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Une biodiversité exceptionnelle

Tous les explorateurs qui ont abordé la Martinique se sont dits autant fascinés par la végétation enchanteresse de l’île qu’effrayés par son caractère indomptable. Une abondance végétale qui a largement contribué à la naissance du mythe de « Madinina, l’île aux fleurs ».

Au centre de l’archipel des Petites Antilles, la Martinique abrite un patrimoine naturel d’exception façonné par l’activité volcanique et les mouvements de population. Une biodiversité unique, marquée par une diversité d’espèces, à la fois locales et implantées, mais qui demeure fragile.

De par l’exceptionnelle richesse de ses écosystèmes, la Martinique est classée parmi les 36  «points chauds » ou « hotspots » mondiaux car elle héberge un nombre important d’espèces animales et végétales.

Sur une superficie restreinte (70 km de long pour 12 à 30 km de large), la Martinique abrite un kaléidoscope végétal qui varie en fonction du relief, des vents, de la pluviométrie et des températures. On trouve ainsi : de hautes montagnes avec des savanes altitudinales ; des forêts humides (caractérisées par des précipitations abondantes) ; des plaines et prairies agricoles ; des mornes peu élevés ; des plages de sable blanc ou de sable noir ; des mangroves, ces fameuses forêts inondées qui sont des écosystèmes fragiles d’une importance capitale car elles sont des réservoirs de biodiversité et abritent des habitats pour de nombreuses espèces qui viennent s’y nourrir et s’y reproduire.

Le mythe de l’île aux fleurs

On recense en Martinique près de 3 000 espèces végétales, parmi lesquelles : 1 500 plantes autochtones, 442 arbres, 323 espèces de fougères, 202 taxons d’orchidées.

Une végétation luxuriante. La topographie de l’île et le climat tropical favorisent en effet une végétation luxuriante. Bougainvilliers, flamboyants, alamandas (fleur en forme d'entonnoir, jaune et dorée ou rose, originaire d'Amérique centrale et d'Amérique du Sud), balisiers (l’emblème de l’île avec ses superbes fleurs rouge orangé), anthuriums, hibiscus (la Martinique en compterait plus de 150 espèces !), bégonias, ixoras (aux fleurs jaunes), oiseaux de paradis, orchidées de toutes sortes, roses de porcelaine ou encore alpinias (plante herbacée tropicale à la fleur en épis rouge, rose ou blanche)… On dénombre aussi plus de 200 familles de plantes à fleurs en Martinique, sans compter les plantes sans fleurs, également très nombreuses : algues, lichens, mousses, fougères et champignons.

Une diversité qui s’explique par l’histoire. Après avoir essayé en vain d’acclimater en Europe les espèces tropicales, les botanistes ont compris que la Martinique pourrait, en revanche, devenir le terreau de précieuses plantes récoltées à travers le monde. La végétation de l’île est très diversifiée.

Sous le couvert de grands arbres tropicaux qui filtrent la lumière, les bégonias et les fougères tapissent le sol. Plus haut, les magnifiques balisiers (Heliconia) aux larges feuilles rubanées présentent d’énormes fleurs richement colorées, uniques dans le monde végétal. Ici, on les produit en grande quantité pour la vente locale et surtout pour l’exportation vers les grands ateliers français ou américains d’art floral. La rose de porcelaine, aux pétales cireux rosés et aux grandes tiges rigides, fait aussi le bonheur des fleuristes. De minuscules parcelles de terrain, sans cesse reconquises sur la forêt, sont plantées d’anthuriums aux fleurs rouges, roses ou blanches.

Cette diversité exceptionnelle de la flore martiniquaise s’explique en effet par l’histoire géologique singulière des Petites Antilles. Les végétaux ont été transportés facilement par les vents, les oiseaux et les courants marins, sous forme de graines ou de bois flottés (des portions d’arbres) qui auraient dérivé depuis les côtes d’Amérique du Sud. La Martinique étant située au cœur de l’archipel des Petites Antilles, elle a bénéficié en priorité de ces apports végétaux d’Amérique et des Grandes Antilles. Mais la plupart ont été introduits au gré des mouvements de population, par les Amérindiens, les Européens, les Africains, les Indiens… Certaines se sont si bien implantées qu'elles sont aujourd'hui caractéristiques du paysage martiniquais. C’est le cas du flamboyant, venu de Madagascar, tout comme l’arbre du voyageur, du bougainvillier, originaire du Brésil, et bien sûr de nombreux palmiers, comme le cocotier, d’origine asiatique. Quant à l’arbre à pain, il a été importé de Tahiti à la fin du XVIIIe siècle par les Britanniques. Il en va de même pour les fruits et les légumes. Ainsi, l’avocatier, le cacaoyer, le calebassier, le manioc, le goyavier, le manguier ou encore le papayer ont été apportés par les Amérindiens. La banane et la canne à sucre, quant à elles, seraient arrivées en Martinique grâce aux colons européens.

La forêt

Couvrant plus de la moitié de la surface de l’île, les forêts sont omniprésentes en Martinique.

Elles sont l'un des atouts majeurs de l'île, favorisant l’émergence d’un tourisme vert en plein développement. Leur diversité en fait un objet d'étude précieux pour les scientifiques et une source d'émerveillement pour les touristes. Sachez quitter la plage pour entrer dans les bois et y découvrir la splendeur des arbres centenaires, la richesse des couleurs et des parfums, les cascades d'eau cachées dans les falaises et les arbres ruisselant d’épiphytes... La forêt la plus importante de Martinique est celle qui recouvre les massifs de la montagne Pelée, des pitons du Carbet et de Morne-Jacob. La Martinique abrite plusieurs types de forêts :

la forêt xérophile dite sèche sur les basses pentes des mornes et des îlets du sud, où prospèrent le fromager, le figuier maudit, le gommier rouge ou encore le frangipanier ;

la forêt mésophile ou humide (entre 200 et 500 mètres d’altitude), dite aussi intermédiaire. C’est dans cette zone que se trouvent les beaux arbres fruitiers (cacaoyer, manguier, arbre à pain, goyavier) et surtout la mangrove, qui occupe environ 1 800 hectares en Martinique, reconnaissable à ses palétuviers rouges, dont les racines aériennes en échasse jouent un rôle de filtre et contribuent à garder une eau claire, favorable à la croissance des récifs coralliens ;

la forêt hygrophile ou forêt de la pluie : c’est le royaume de la « forêt vierge », luxuriante, riche en lianes et en épiphytes qui colonisent les grands arbres dépassant allègrement les 30 mètres de hauteur, en raison des précipitations abondantes qui s’y abattent. Ici on croise toutes sortes de lianes, fougères, orchidées, balisiers et de broméliacées ;

la forêt altitudinale enfin, à partir de 1000 mètres d’altitude, où s’épanouissent mousses, lichens, fougères arborescentes et savanes.

Un patrimoine vert sous haute protection

Un tel patrimoine justifie en effet que se développe une gestion adaptée fondée sur la préservation des écosystèmes, aujourd’hui menacés par l’urbanisation galopante. La protection de ces espaces naturels est l’un des grands enjeux des politiques publiques en Martinique. Afin de protéger cette biodiversité exceptionnelle, plusieurs dispositifs permettent de sauvegarder ces espaces naturels, à commencer par les réserves naturelles, notamment la réserve de la montagne Pelée (1 540 ha), la réserve des pitons du Carbet (1 330 ha) et la réserve du Morne-Jacob (1 330 ha).

La préservation des milieux passe par la création de périmètres de protection. Une cinquantaine de sites sont aujourd’hui inscrits ou classés en Martinique, notamment autour des littoraux qui font l’objet d’importantes actions de protection : la presqu’île de la Caravelle, le site des Salines, le rocher du Diamant ou encore les îlets du François bénéficient d’une règlementation spécifique permettant de préserver la faune et la flore de ces écosystèmes. il y a également des acquisitions de sites (forêts…) par le Conservatoire du Littoral et le Parc naturel régional de Martinique (PNRM) afin de les placer sous haute protection. Le PNRM est né en 1976 de la volonté d’allier le développement économique de l’île avec la préservation de ses richesses naturelles et culturelles. Il englobe aujourd’hui 70 % du territoire, 32 communes, soit la majeure partie des forêts de Martinique et la plupart des zones naturelles et paysagères remarquables. Depuis plusieurs années, le PNRM soutient d’ailleurs une démarche visant à inscrire les Volcans et Forêts de la montagne Pelée et des Pitons du Nord sur la liste du patrimoine mondial de l’Unesco. L’île héberge en effet des espèces faunistiques et floristiques reconnues comme irremplaçables à l'échelle de l’humanité.

Une faune précieuse et variée

Si la flore martiniquaise est reconnue comme étant exceptionnelle, la faune n’est pas en reste.

Des espèces endémiques. Bien que certaines espèces présentes au début de la colonisation, comme le lamantin des Antilles (un phoque d'eau douce) ou l'agouti (un petit rongeur), aient aujourd’hui disparu de l'île, victimes d’une chasse excessive, la faune de la Martinique demeure riche et variée. Certaines espèces animales endémiques préfèrent néanmoins rester discrètes, à l'instar des mangoustes (mammifère originaire d’Inde à mi-chemin entre l’écureuil et le rat, de la même famille que les suricates), des manicous (sorte d’opossum au museau pointu) et du serpent trigonocéphale. Egalement appelé fer-de-lance ou vipère jaune, c'est la seule espèce de serpent présente sur l'île (et l’une des plus dangereuses). Pour information, il aime être à l'écart, dans les champs de canne, les forêts ou les sous-bois. Il est difficile à débusquer car il se cache de la mangouste, son prédateur, introduite dans l'île pour le combattre. D’ailleurs, il n’est pas rare que les mangoustes et les serpents remplacent les coqs dans les pitt

Vous croiserez très facilement, un peu partout, des anolis (des lézards verts) et des crabes sur les plages, éventuellement quelques chauves-souris. Le reptile le plus spectaculaire de l’île demeure l’iguane, espèce très protégée, tout comme les tortues marines.

Oiseaux. Côté air, on recense quelque 200 espèces d’oiseaux sur l’île. Le plus célèbre de Martinique est indiscutablement le colibri, oiseau mouche qui ne mesure pas plus de 10 cm et se reconnaît aisément à son long bec ! Quatre espèces de colibri vivent en Martinique, parmi lesquels le madère, le plus gros des colibris (12 cm !). Dans le ciel et dans les arbres, on peut admirer aussi des grives, des carouges (endémiques de l’île), des sucriers et des merles, traditionnellement posés sur les hibiscus, et butinant les fleurs aux côtés des papillons aux mille et une couleurs. Dans les forêts du nord, c’est le siffleur des montagnes qui domine, dans les sentiers les ortolans, devenus si rares en métropole, et sur les littoraux les hérons et les aiglons.

Faune aquatique. Dans les eaux limpides martiniquaises, la faune et la flore des barrières de corail offrent un spectacle éblouissant par la variété des couleurs et la diversité des espèces : le nageur curieux évoluera au milieu de bancs de petits poissons colorés et en prendra plein la vue, entre les multiples étoiles de mer, éponges, coraux, oursins et bien sûr lambis, célèbre coquillage des Antilles, qui peuplent les fonds marins. Poissons-volants, poissons-papillons, sergent-major, poissons-pyjamas et poissons-chirurgiens sont, eux, plus discrets, mais tout aussi présents. Tout comme les vivaneaux, thons, thazards, langoustes sortant timidement leurs antennes des anfractuosités sous-marines et même les raies ! Comme leurs cousins terrestres, les fonds marins martiniquais font l’objet de mesures de protection pour sauvegarder les espèces qui y vivent.

Insectes. Enfin, on dénombre environ 500 insectes différents en Martinique. Papillons (notamment le fameux monarque américain) et libellules prolifèrent, sans oublier malheureusement les moustiques, véritable fléau aux Antilles, d’autant que le moustique tigre est vecteur de maladies (dengue, virus Zika…). Insaisissables mais bien présents, le grillon et le cabrit bois (de la même famille que les sauterelles) vous régaleront tous les soirs d'un harmonieux concert musical, auquel s’ajoutera le coassement typique des grenouilles martiniquaises. En résumé, la faune en Martinique apparaît plus bigarrée que méchante, plus insouciante que dangereuse.

Des nuisances d’origine naturelle

Le problème des algues sargasses. Depuis 2011, entre mars et juillet, les plages antillaises voient arriver en nombres des invités indésirables : les sargasses, des algues brunes flottantes qui se développent en milieu tropical au nord-est du Brésil. Elles sont connues depuis longtemps des pêcheurs, mais envahissent désormais une grande partie du littoral antillais à cause des courants marins, occasionnant une gêne considérable.

Car ces algues, sans danger en cas de contact direct sur la peau, libèrent un gaz toxique nauséabond lorsqu’elles se décomposent : le sulfure d'hydrogène. Celui-ci peut provoquer irritation des yeux, maux de tête, vomissements, difficultés respiratoires, ce qui, bien sûr, compromet grandement la baignade, et altère fortement les conditions de vie des habitants, à cause des émanations de gaz dues à l'accumulation des sargasses en décomposition.

Les professionnels de la mer sont également confrontés à ce désagrément, comme les pêcheurs qui se retrouvent fortement handicapés pour la pose de leurs filets. Face à cette situation, les collectivités tentent de faire leur possible en dégageant les plages, mais il ne faut que quelques jours à ces algues pour reprendre leur place et stagner le long des côtes de l'île. Plusieurs solutions sont envisagées pour faire face à ce nouveau type d’invasion des côtes : étaler ces algues en couches minces afin qu’elles sèchent au soleil sans pourrir et provoquer des odeurs désagréables, les utiliser comme compost, les récupérer en pleine mer grâce à un navire dépollueur avant qu’elles n’atteignent les côtes… L'ARS et Madininair ont en octobre 2019 mis en place un réseau de capteurs H2S dans les principales zones impactées afin d’assurer la surveillance renforcée des émanations d’hydrogène sulfuré, mais à ce jour aucune solution efficace n'a été mise en place.

Autre nuisance qui touche la Martinique : les brumes des sables. De mars à septembre, l’île est régulièrement touchée par des épisodes de pollution de l’air. Ces brumes des sables venues du Sahara sont en réalité des grains de sable qui retombent sur les Petites Antilles en formant des particules fines responsables de la pollution de l’air. Le seuil d’alerte est déclenché à partir de 50 microgrammes. Les Martiniquais sont alors invités à limiter leurs activités sportives, tout particulièrement les enfants et les personnes âgées.