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Une économie agricole dépendante des cours mondiaux

Le pays est peu urbanisé, mais compte environ 200 villes entre 10 000 et 100 000 habitants. Dar es Salaam cumule 2,7 millions d’habitants, tandis que la capitale Dodoma ne compte que 180 000 habitants. Environ 70 % de la population est rurale, même si ce taux baisse d’année en année. Le PIB dépend toujours des ressources agraires puisque l’agriculture représente 25 % du PIB du pays et emploie 65 % de la population active. Particularité : toutes les terres appartiennent à l’Etat, qui peut réaliser des concessions locatives allant jusqu’à 99 ans !

Le socialisme nyereriste puis la libéralisation de 1983 ont porté leurs efforts sur les fermes, d’abord les communautés villageoises, puis les grandes fermes d’Etat et les grandes exploitations privées. L’équipement de toutes ces exploitations atteint un niveau de mécanisation satisfaisant par rapport à celui des pays voisins. L’autosuffisance alimentaire est atteinte en ce qui concerne la plupart des produits. Les cultures vivrières sont le maïs, la banane (dont la banane plantain, dite douce), le riz, le sorgho, la noix de coco, la patate douce, le millet et les haricots (rouges principalement). La Tanzanie est l’un des plus gros exportateurs au monde de sisal. Son commerce extérieur, très dépendant de l’agriculture, souffre néanmoins de la faiblesse des cours mondiaux, un problème qui touche beaucoup de pays en développement.

Une corruption problématique et endémique

La corruption mine depuis longtemps l’économie de la Tanzanie. Le président du pays John Magufuli, qui était en exercice de 2015 à 2020 (aujourd’hui décédé), a fait de la lutte anti-corruption un de ses fers de lance. On a pu voir quelques changements puisque désormais aucun parc national n’accepte d’espèces, seuls les paiements par CB et cartes Tanapa prépayées dans des banques, avec un traçage de l’argent, sont acceptés. Près de 10 000 fonctionnaires avec de faux diplômes ont été éjectés de l’administration nationale. La corruption reste élevée, de 62 sur 100 contre 70 en 2015, pour le secteur public en 2022 selon l'indice de corruption de l'ONG Transparency International, plaçant le pays à la 98e place mondiale. Samia Suluhu, la nouvelle présidente tanzanienne qui a succédé à John Magufuli, tend à poursuivre le combat contre la corruption, même s'il reste beaucoup de chemin à faire.

L’élevage et la pêche sous-exploités

L’élevage du bétail atteint des niveaux plutôt satisfaisants. La Tanzanie a un très grand nombre de têtes. Mais la quasi-totalité de ce cheptel appartient à des familles rurales, sans aucune intention ou possibilité d’exportation, un certain manque à gagner pour le pays. Les ressources potentielles de poissons sont énormes en Tanzanie, aussi bien grâce aux grands lacs d’eau douce qu’aux 800 km de côtes de l’océan Indien. Mais 95 % de la pêche est faite par de petits pêcheurs indépendants, utilisant des techniques archaïques dans des embarcations traditionnelles. Les ressources restent donc largement sous-exploitées, en particulier en ce qui concerne des espèces assez facilement exportables comme la langouste ou la crevette. Enfin, le pays, recouvert à 40 % de forêts, produit plusieurs millions de m3 de bois par an, malheureusement rarement remplacés.

Un développement industriel tiré par les mines

L’industrie représente environ 30 % du PIB, une part toujours plus grande du PIB tanzanien. Néanmoins, la réticence des investisseurs à venir s’implanter en Tanzanie vient, comme dans beaucoup d’autres pays africains, du faible niveau de formation de la main-d’œuvre et de la faible solvabilité du marché potentiel. Mais aussi et peut-être surtout de la difficulté et du coût des importations des matériaux nécessaires d’abord à l’installation, puis au fonctionnement et à la production. L’extraction minière est l’une des activités connaissant le plus de croissance en Tanzanie : le pays compte quatre mines d’or et figure au 4e rang des producteurs sur le continent, après l’Afrique du Sud, le Ghana et le Mali. Les principales ressources actuellement extraites sont le diamant, la tanzanite, le rubis, l’or, le titane et le charbon. Le sous-sol contient également du fer, du nickel, du cuivre, du cobalt, du kaolin et du graphite, quasiment pas exploités.

Les services, le point fort de l’économie du pays

Les services représentent près de 50 % du PIB. Les fonctionnaires représentent en Tanzanie une part encore importante de la population active, hors entreprises publiques. Ce qui, dans un pays pauvre, encore rural et souffrant d’un manque d’industrialisation, n’est pas très étonnant. La police est omniprésente, et l’armée encore très importante, puisque près de 1 % du PIB lui est consacré. Cependant, une part croissante de la population active du secteur tertiaire est à présent représentée par les services privés, le commerce et le tourisme.

Le tourisme en plein essor porte beaucoup d’espoirs

Spectaculaire pour les safaris qu’elle offre, un séjour de plage à Zanzibar ou l’ascension du Kilimandjaro, la Tanzanie attire toujours plus de touristes. Depuis 10 ans, le secteur touristique ne cesse de se développer. Il contribue déjà à plus de 16 % du PIB du pays et même 30 % du PIB de Zanzibar. Les revenus générés par le tourisme en Tanzanie ont progressé pour atteindre 3 milliards de dollars en 2023 et un total d'environ 1,5 million de touristes par an. La Tanzanie propose une offre très haut de gamme, aussi bien pour le safari que les séjours de plage à Zanzibar. Les taxes d’entrée élevées dans ses parcs nationaux et le standing des lodges en font une destination de luxe qui rapporte à l’État. Le pays, particulièrement sûr et calme, est de mieux en mieux desservi par les compagnies d’avion venant d’Europe. Le Tanzania Tourist Board (TTB) a signé avec de grands investisseurs occidentaux des concessions ou des autorisations de création d’hôtels. Enfin, la promotion d’une chasse sportive (trophées) d’animaux souvent issus d’espèces menacées (ce qui crée bien sûr une grande polémique et un scandale mondial) génère des revenus très importants car un chasseur dépense en moyenne 35 000 US$ dans le pays.

La lutte contre le braconnage efficace

Triste record : le pangolin était - juste avant le Covid-19 - l’animal le plus braconné au monde. Les écailles et griffes de cet animal auraient des vertus médicinales et aphrodisiaques en médecines traditionnelles asiatiques. Tout comme la corne des rhinocéros, qui sont les animaux désormais les plus menacés d’extinction en Afrique. D’autres grands mammifères sont en péril, l’éléphant surtout, pour son ivoire dont le commerce est très lucratif. L’ivoire est encore intensément convoité pour les palanquins de Chine, les poignées de dague et les pièces de jeux du Moyen-Orient... Il nourrit encore aujourd’hui de nombreux trafics. Difficile de chiffrer le braconnage du pangolin. En revanche les carcasses d’éléphants sont plus visibles. Les éléphants qui étaient 110 000 en Tanzanie en 2009 ont été massacrés et réduits à 34 000 têtes en 2014. Mais selon le gouvernement, leur population aurait augmenté à nouveau à 60 000 en 2024 car le braconnage aurait même chuté de près de 70 % entre 2014 et 2023, grâce à l'intensification de la de la National Anti-Braconnage Task Force (NTAP). Des outils technologiques comme des détecteurs de mouvement venus du Japon auraient sensiblement amélioré les techniques de traque des braconniers. Les rhinocéros, réduits à quelques centaines d’individus en Afrique, auraient bondi de 15 à 167 rhinos en Tanzanie en 4 ans, en comptant les réintroductions. Eh oui : ne pas avoir les Big 5 dans un parc national ultra réputé, niveau marketing c’est moyen, et quand on vend des safaris, on se doit d’en voir au moins un ! Résultat : le Zimbabwe et l’Afrique du Sud exportent des rhinos moyennant beaucoup d’argent à leurs voisins pays de safaris. Les lions, si nombreux au Serengeti, ont vu leur population générale chuter de 50 % en 25 ans sur tout le continent. S’il en reste près de 25 000 en Afrique, dont entre 3 000 à 3 500 dans le Serengeti, leur population devrait encore malheureusement chuter. Ce qui n’empêche pas les pays comme la Tanzanie, le Zimbabwe et la Zambie de continuer à autoriser la chasse aux trophées de lions pour des questions d'argent.

L'expulsion des Maasaïs vers Ngorongoro et Loliondo

La Zone de Conservation de Ngorongoro (ZCN), très vaste de 8 288 km2, entoure le cratère en lui-même classé Parc national. Les Maasaïs vivent historiquement dans cette région avec leur troupeaux de vaches, mais plus dans le cratère depuis la création du parc en 1959. Ces populations pastorales à l'origine nomade se sont sédentarisées en masse. Ils étaient 8 000 en 1959 à la création du Parc national à vivre dans la fameuse ZCN, et sont plus de 100 000 aujourd’hui. Leur cheptel a bondi en quelques années, passant de 260 000 têtes en 2017 à plus d’un million en 2023 ! La cause : les plaines fertiles d'altitude mais aussi un trafic : beaucoup d'investisseurs confient des vaches aux Maasaïs qui vivent là, des terres gratuites quelle aubaine ! Résultat, la zone est gravement menacée de surpopulation d'autant plus que le bois est exploité pour faire la cuisine et se chauffer. Mais les Maasaïs accusent le gouvernement de les chasser de leurs terres historiques pour les transformer en Parc national de safari ou en réserve de chasse. Ce qui est absolument vrai à Loliondo, à la frontière du Kenya (hors de la ZCN). Sous couvert en raison officielle de conflit entre les populations maasaïs et les animaux, un projet de « sanctuarisation » de 1 500 km2 sur les 4 000 m2 de la zone chasserait 70 000 personnes de leurs villages, pour créer une zone « de safari, de chasse et de conservation ». Une expulsion qualifiée de « brutale », « illégale » et « choquante » par Amnesty International. En réalité, la riche société des Émirats arabes unis Otterlo Business Corporation (OBC) est derrière ce projet, pour créer une zone de chasse aux trophées... Un double scandale donc. Au total : 150 000 Maasaïs pourraient être expulsés de la Zone de Conservation de Ngorongoro et de la région de Loliondo. La relocalisation « volontaire » proposée n'a pas convaincu grand monde à ce jour. Pire, en juin 2022, des Maasaïs qui protestaient contre la pause de balises à Loliondo définissant les zones humaines et animales se sont fait tirer dessus à balles réelles par la police et ont répliqué avec des flèches. Le bilan est de 33 blessés par balle et un mort chez les Maasaïs, et d'un mort dans la police.