Écoliers cubains © diego_cervo - iStockphoto.com.jpg
Zone de wifi à La Havane © photosounds - Shutterstock.com.jpg

L'éducation et la santé : les deux fers de lance de Cuba

Éducation cubaine. Concernant le déroulement de la scolarité des jeunes cubains (obligatoire jusqu'à 16 ans), ces derniers entrent à l'école primaire dès 5 ans et en sortent vers 11 ans. Viennent ensuite trois années d'enseignement secondaire, puis trois années supplémentaires d'enseignement pré-universitaire. A la fin du premier cycle secondaire, ceux qui décident de ne pas poursuivre le cursus général jusqu'au preuniversitario (baccalauréat) peuvent choisir une filière professionnelle : agriculture, commerce, économie, langues étrangères ou tourisme. Les élèves titulaires du preuniversitario doivent ensuite passer un concours d'entrée dont l'échec est synonyme de service militaire obligatoire, pour deux années. Ceux qui parviennent à entrer à l'université (facultés et instituts pédagogiques se retrouvent aux quatre coins de l'île) y restent généralement cinq ans, même si des écoles techniques délivrent des formations en trois ans, pour les secteurs de l'hôtellerie, l'informatique, l'infirmerie et le design industriel notamment. Parallèlement, un enseignement spécifique est assuré pour les enfants sourds, muets ou handicapés moteurs, chacun recevant gratuitement un traitement adapté à son handicap.

Médecine cubaine. L'autre grande fierté de Cuba est son système de santé. Depuis la révolution en 1959, le développement de la médecine a effet été une l'une des principales priorités du régime, plaçant Cuba dans une position d'avant-garde en termes de santé : c'est bien sur l'île de Fidel que l'on trouve le plus grand nombre de médecins par habitants, et ce à l'échelle planétaire. Il faut dire que les études sont gratuites, dispensées par plus de 40 000 professeurs répartis dans 24 facultés aux quatre coins de l'île, et ouvertes, depuis 1999, aux étudiants étrangers. La volonté affichée du régime est de venir en aide au pays défavorisés n'étant pas en mesure de soigner leur population. Depuis 1963 (Algérie), les médecins cubains participent activement à des campagnes humanitaires et l'on estime aujourd'hui qu'ils sont quelques 30 000 répartis dans une soixantaine de pays défavorisés.

Concernant le système de santé sur place, les Cubains peuvent consulter gratuitement et les médicaments dont ils peuvent avoir besoin sont financièrement très accessibles (ce qui n'est pas le cas pour les étrangers de passage). Certains médicaments ne sont toutefois pas disponibles sur l'île, en raison de l'embargo américain qui décourage certains laboratoires de travailler avec Cuba. Ainsi, vous ne trouverez pas de pilule du lendemain. Grâce à ce système de santé très performant, l'espérance de vie des Cubains est particulièrement élevée – 79,5 ans, contre 78,1 ans aux États-Unis – et un taux de mortalité infantile très bas : 4,4 ‰, plus bas, là-aussi, que celui du voisin états-unien. Ces statistiques placent Cuba dans la moyenne des pays les plus développés. Côté infrastructure hospitalière, elle est plutôt bien entretenue et très propre, bien que le matériel fasse souvent défaut, en raison là encore de l'embargo américain, ce qui peut poser de sérieux problèmes en cas d'intervention chirurgicale lourde.

Difficultés du quotidien

Logement. Si côté éducation et santé les Cubains sont plutôt bien lotis, il n'en va pas forcément de même dans d'autres aspects de la vie quotidienne. La question du logement, pour commencer, peut en effet s'avérer problématique. Les quelque trois millions de résidents de La Havane vivent particulièrement à l'étroit, souvent à plusieurs générations. Cette promiscuité peut avoir tendance à créer des incommodités, voire des conflits familiaux. De fait, le taux de divorce à Cuba avoisine les 60 %, soit le taux le plus élevé au monde. Par ailleurs, difficile pour un jeune couple de trouver de l'intimité lorsqu'une relation débute... La discrétion est donc de mise. Pour remédier à cela, des établissements du même type que les casas particulares ont vu le jour : les hospedajes accueillent les couples pour quelques heures et une poignée de pesos.

La question du déménagement n'est pas de tout repos non plus. Selon la loi, un Cubain, pour changer de logement, est obligé d'échanger le sien avec celui d'un autre. Ce nouveau logement doit néanmoins être identique. Cette action est nommée permutar, et il n'est pas rare, en particulier à La Havane, d'apercevoir des pancartes « se permuta » accrochées aux immeubles du centre-ville. Dans le cas d'un échange inégal, celui qui fait l'acquisition d'un logement plus grand paie généralement en monnaie sonnante et trébuchante une certaine somme à l'autre.

Transport. Les déplacements : un autre grand souci du quotidien pour les Cubains. Pour se déplacer, les deux principales possibilités sont le bus (bondé !) et l'auto-stop. Le stop à la cubaine consiste à se mettre le bas-côté de la route et à agiter la main pour interpeller les automobilistes. Naturellement, les jolies filles ont plus de succès dans cette manœuvre, et la concurrence est somme toute assez déloyale. Si l'achat de voiture était interdit jusqu'à 2011, c'est à présent possible. Toutefois, les Cubains ayant les moyens de franchir le pas sont rares. Des années d'économies sont nécessaires pour y parvenir. Parallèlement, l'approvisionnement en essence est un problème récurrent, plus encore depuis que le Venezuela, pays ami, est empêtré dans un marasme politico-économique. En cas de manque de combustibles, priorité est donnée aux bus de la compagnie Viazul, réservée aux touristes.

Une autre option pour les longs voyages à travers l'île est... le train ! De fait, Cuba fut le 1er pays d'Amérique latine et le 6e au monde (avant l'Espagne) à se doter de lignes de chemin de fer ! Au total, plus de 8 000 km de voies (5 000 dédiées au transport de passagers) relient les principales villes du pays, de l'Occidente à l'Oriente. Toutefois, et malgré l'arrivée en 2019 de nouveaux trains commandés massivement à la Chine, les infrastructures du réseau ferré sont très vieilles et mériteraient une rénovation profonde. Les trains roulent bel et bien, mais très lentement, et la ponctualité n'est pas le point fort des services ferroviaires cubains.

Alimentation. Côté alimentation, c'est toujours la libreta, un carnet de rationnement dont dispose chaque Cubain, qui permet à tout un chacun de se nourrir décemment. La libreta permet de s'approvisionner à tarifs dérisoires en aliment de base. Pour un mois, chaque Cubain a droit une certaine quantité de riz, de haricots, de sucre, d'œufs, d'huile de cuisson, de tabac, etc. Toutefois, cette quantité de nourriture ne couvre réellement que 30 % des besoins alimentaires d'un homme normalement constitué, voire moins... Difficile dans ces conditions de nourrir toute une famille. Pour compléter, il devient nécessaire de se tourner vers le marché noir pour faire quelques bonnes affaires, quoique de moins en moins bonne depuis la dévaluation monétaire de 2021 et l'inflation conséquente. Les Cubains qui ont les moyens peuvent quant à eux se rendre dans les supermarchés, beaucoup plus chers, et où l'on trouve des produits de meilleure qualité.

Communication. Concernant les communications, internet n'est ni libre, ni gratuit à Cuba. Certes, les foyers cubains sont dotés d'une connexion internet haut débit suffisante, mais l'abonnement est à tarif prohibitif (aux alentours de 100 € le mois, mais pouvant varier de 50 à 230 €), et ce sont les propriétaires de casas particulares qui ont généralement les moyens de se l'offrir. Les ordinateurs se trouvent en général dans les bureaux ETECSA du pays (l'entreprise nationale de communication cubaine) ou dans les lobbies des grands hôtels, et la connexion coûte 1 € de l'heure. Par ailleurs, un réseau wifi public ETECSA a été mis en place en 2015, auquel Cubains et touristes peuvent se connecter depuis leurs smartphones ou ordinateurs. Là aussi, le tarif est fixé à 1 € de l'heure. On se connecte au réseau public depuis certaines zones urbaines : les abords des grands hôtels et des bureaux ETECSA, mais aussi les places principales des villes. Le réseau a toutefois tendance à être saturé aux heures de pointe, à savoir entre 8h et 10h, entre 12h et 15h et après 18h. Il existe des forfaits 3G, financièrement accessibles à la classe moyenne uniquement.

Evolution des moeurs cubaines

La liberté d'expression n'est pas forcément la bienvenue à Cuba : toute la presse est scrupuleusement contrôlée par le régime, afin de s'assurer que le point de vue du parti unique est le seul à être représenté. N'est qu'à jeter un œil à l'édito du Granma. Cette volonté peut se traduire par l'emprisonnement pur et simple de tout Cubain manifestement désireux de mettre en place une rébellion ou de créer un parti dissident. Bien que peu se confieront sur le sujet à des touristes de passage, la grande majorité des Cubains ressentent une réelle peur de l’État. D'une certaine manière, tout le monde surveille tout le monde à Cuba, et les CDR (Comités de la Révolution qui gèrent les quartiers dans les villes) s'assurent que cette surveillance soit effectuée de façon officielle.

Pour ce qui touche aux mariages et au divorce, le cas cubain est assez singulier. La promiscuité dans les appartements de La Havane crée des conflits, qui mènent bien souvent au divorce. Cuba occupe le première place mondiale, avec un taux de 60 % ! Autorisé 15 jours après un mariage, le divorce se paie 100 pesos cubains. Si bien qu'il n'est pas rare de rencontrer des jeunes Cubains qui en sont déjà à leur troisième ou quatrième expérience conjugale ! Cette situation s'explique en partie par la difficulté qu'ont les jeunes mariés à trouver un logement, et sont donc généralement contraints de s'installer chez les parents de l'un ou de l'autre. Par ailleurs, l'émancipation des femmes conjuguée à la perte d'influence de l’Église catholique est un autre facteur de bouleversement familiaux. Pour de nombreux Cubains, le mariage avec un(e) étranger(e) représente une porte de sortie.

Quelle est la place de la communauté homosexuelle à Cuba ? Il y a 40 ans, la discrimination envers les lesbiennes et les gays était réelle. Il aura fallu attendre 1997 pour que les dernières références homophobes présentes dans la législation cubaine soient abolies. C'est à Mariela Castro Espín, fille de Raúl, que l'on doit la loi interdisant toute discrimination envers les gays, les lesbiennes, les bisexuels et les transsexuels dans les domaines du travail et du logement. Cette même loi autorise les opérations chirurgicales pour changer de sexe, accompagnées de papiers d’identité en accord avec le sexe modifié. Ces frais sont même pris en charge par les services de santé. Pas de mariage ni d'adoption pour deux personnes du même sexe, mais un partenariat civil est quant à lui possible. Également, depuis 2015, la journée internationale contre l'homophobie (17 mai) est célébrée à Cuba. Malgré cet élan officiel de tolérance, la machisme latino a la dent dure.