Stradun, la rue principale de Dubrovnik. ©Emanuel Metzenthin -shutterstock.com.jpg

Parité respectée, droit à l'avortement contesté

L’égalité des sexes était l’une des conditions pour l’adhésion à l’Union européenne. Durant la dernière guerre (1991-1995), les femmes en Croatie ont subi le durcissement de la structure sociale paternaliste, surtout dans les milieux ruraux. La politique nataliste avait relégué la femme à sa seule fonction maternelle. Il faudra attendre l’action militante des féministes (années 2000) pour que des législations commencent à sanctionner les violences conjugales et favoriser une meilleure parité au travail, notamment dans la sphère politique.

Autre combat pour les femmes, le droit à l’avortement. Bien que voté durant l’ère yougoslave, il est régulièrement remis en cause par les médecins réticents, qui sont soutenus dans leur « cas de conscience » par des militants antiavortement, très actifs, comme aux États-Unis. Les « Marches pour la vie » attirent du monde chaque année. En mai 2022, plusieurs milliers de personnes ont manifesté contre l’avortement, alors qu’une mère porteuse d’un enfant malade s’est vu refuser sa demande d’interruption de grossesse par quatre hôpitaux de Zagreb. La pression publique a finalement contraint une commission médicale à autoriser l’IVG.

Un système éducatif de qualité

La scolarité dans les établissements publics d’enseignement primaire et secondaire est gratuite. Les élèves rentrent en CP à l’âge de 7 ans, où ils commencent à apprendre l’anglais – quasiment tous les jeunes Croates parlent couramment au moins une langue étrangère.

En primaire, les enfants ont quatre à cinq heures de cours par jour, cinq jours par semaine, de 8h à midi. Au collège, les élèves alternent ces cinq jours, une semaine le matin (8h-13h), une semaine l’après-midi (14h-19h). Il n’y a pas donc pas de cantine mais les écoliers ont plus de temps pour les classes de sport, les cours de musique, de danse de d’arts plastiques. Les grandes vacances durent de mi-juin à début septembre plus deux semaines à Noël et une seule à Pâques.

Les établissements d’enseignement secondaire se répartissent en fonction des programmes des lycées généraux (gymnases), professionnels (techniques, industriels, artisanaux) ou artistiques (musique, danse, arts plastiques). Au bout de quatre ans, la réussite à l’examen final dit de maturité (niveau bac) est obligatoire pour s’inscrire à la faculté. Depuis 2009, les universités appliquent le système de Bologne, le diplôme obtenu en Croatie a ses équivalences dans toute l’UE.

Un étudiant étranger peut obtenir une bourse d'études du gouvernement croate. Les candidats sélectionnés bénéficieront des études de premier cycle/cycles supérieurs (A1, A2, B), une subvention mensuelle de 1 600 kn, un billet aller-retour avec le pays d'origine, une assurance ainsi qu’un logement gratuit en résidence étudiante (www.studyincroatia.hr).

Nombre de jeunes diplômés croates vont étudier à l’étranger et souvent y restent. Une réforme de l’éducation s’impose pour renouveler les programmes, affirmer l’engagement financier de l’État, qui devrait favoriser l’accès aux études supérieures, la formation continue en phase avec les demandes du marché du travail.

La famille, entre traditionalisme, entraide et solidarité

Dans un pays à l’économie néolibérale, où les aides financières de l’État sont insignifiantes, la solidarité familiale n’est pas un vain mot. Dans les campagnes, quand les jeunes sont en âge de prendre leur autonomie, s’ils n’ont pas les moyens de s’installer, on élève pour eux un étage. On voit trois, voire quatre générations partager le même toit. Par ailleurs, il est courant que des jeunes travaillant à l’étranger envoient de l’argent à leurs parents.

L’attachement de nombreux Croates à la défense des valeurs traditionnelles chrétiennes a des répercussions sur la société. Ainsi, en 2013, un référendum réclamé par des associations catholiques portait sur la définition constitutionnelle du mariage comme « fondement de la famille et de la société ». Il a consacré une seule union possible, celle d’un homme et d’une femme. Parmi les votants, 65,76 % ont dit non au mariage gay. Après un débat d’idées virulent, l’Église a fait pencher la Cour constitutionnelle, l’enseignement de l’éducation sexuelle a également été interdit à l’école. En juillet 2014, le Parlement a tout de même adopté une loi autorisant les unions civiles entre personnes de même sexe, leur accordant les mêmes droits en matière de succession, d’avantages sociaux et de fiscalité, mais excluant le droit à l’adoption d'enfant. À la suite d'une décision de justice (2020), les couples de même sexe peuvent désormais faire cette demande d'adoption. Si les comportements homophobes inquiètent toujours les militants des droits LGBTQI, les droits des homosexuels sont mieux acceptés. La petite communauté bénéficie d’une meilleure visibilité grâce à de nouveaux lieux d’accueil associatifs et à des manifestations festives, comme la Gay Pride.

Un système de santé moderne

La médecine légale, tout à fait fiable, évolue selon des normes de qualité rigoureuses dans ses pratiques. Des cliniques privées proposent des offres en tourisme médical (chirurgie esthétique et dentaire). Pour les usagers croates, le régime de sécurité sociale obligatoire inclut les assurances maladie-maternité, invalidité-vieillesse-décès, chômage, mais sert de maigres prestations familiales. Il n’existe pas d’assurances spécifiques pour les accidents du travail ou les maladies professionnelles. La prise en charge des malades et indigents est couverte par des assurances maladie et des fonds de pensions privés. Mais les dépenses de santé élevées font souvent préférer les remèdes de grands-mères.

A noter que l’âge de départ à la retraite en Croatie est de 65 ans pour les hommes et de 63 ans pour les femmes -  une augmentation de 3 mois par an est prévue pour ces dernières afin d'atteindre les 65 ans en 2030.

Une cohésion sociale qui met en avant les valeurs de l’honnêteté

La corruption et le clientélisme toujours rampants, jusque dans l’administration, la police, les écoles et les hôpitaux, laissent une partie de la population plus ou moins apathique. Les gens déplorent ces pratiques mais vivent avec. Glisser une petite enveloppe dans les mains des fonctionnaires de l’État « peut » arranger les choses, accélérer la prise en charge d’un patient par exemple. Depuis l’entrée dans l’UE, ce fléau recule mais d'après de récents sondages, il demeure l'un des moteurs à l'émigration des jeunes. Des élus, des directeurs de clubs sportifs, des chefs d’entreprise ont été condamnés.

La délinquance de voie publique en revanche est très faible. Il convient tout de même d’appliquer des règles de prudence élémentaire, notamment l’été dans les stations balnéaires (pickpockets). Au restaurant, il vaut mieux regarder son addition à deux fois, mais la Croatie reste un pays sûr. Le Global Peace Index, qui classe 163 pays du monde selon leur degré de pacifisme, en prenant en compte l’étendue de leur implication dans les conflits locaux et internationaux et le degré d’harmonie ou de discorde à l’intérieur du pays, positionnait, en 2023, la Croatie en 14e position, derrière la Slovénie (8e) mais largement devant la Bosnie-Herzégovine (61e) et la France (67e).