shutterstock_521425129.jpg
shutterstock_2080182643.jpg
shutterstock_1977299477.jpg

Histoire et produits

Colonisé par le Portugal dès le XVe siècle, le Cap-Vert – qui ne fêta son indépendance qu'en 1975 – fait partie des plus vieilles colonies européennes. Sa position stratégique au cœur de l'Atlantique mais également à proximité du continent africain fut largement utilisée comme centre du commerce d'esclaves, comme point de transit pour la marine portugaise et bien sûr comme station expérimentale pour la culture des produits agricoles des Amériques, tels que le maïs, le piment, les citrouilles et le manioc, au même titre que les Canaries pour la Couronne d'Espagne. Il en fut de même pour les plantes venues d'Asie ou d'Afrique comme les agrumes, la banane, le café ou la canne à sucre, destinées à être implantées au Brésil.

Les Portugais importèrent également d'Europe des produits comme le blé, la vigne ou le bétail, même si les Cap-Verdiens surent toujours valoriser ce que la nature avait à leur offrir. Ainsi poissons et fruits de mer ont toujours eu une place centrale dans ce pays insulaire entouré d'eaux particulièrement généreuses. Thon, espadon, daurade, mérou, sole, maquereau, rouget tiennent le haut du pavé, sans oublier quantité de fruits de mer à commencer par la langouste mais aussi le poulpe, le calamar et les crevettes. On apprécie bien sûr les coquillages comme les lapas (patelles), le búzio (bulot) et les surprenants percebes ou pouces-pieds, qui souffrent malheureusement de surpêche au Cap-Vert tout comme la langouste. Il convient donc d'en consommer avec modération.

En plus des produits de la mer, la base de l’alimentation traditionnelle reste le maïs, les haricots secs, le riz, les légumes-racines ainsi que certaines viandes comme le porc, le poulet, l'agneau, le mouton et la chèvre. La nature volcanique de l'archipel et les éruptions plus ou moins récentes ont enrichi le sol de cendres volcaniques, qui l'ont rendu très fertile, particulièrement sur l'île de Fogo, connu pour la Chã das Caldeiras, un immense cratère où l'on cultive pommes, raisins, coings, grenades, figues, pêches, tomates et bien d'autres fruits et légumes.

On retrouve au Cap-Vert une petite production de fromages dits « queijo » comme le queijo de cabra, au lait de chèvre, produit notamment sur l'île de Santo Antão. Côté charcuterie on citera la linguiça, une saucisse portugaise de porc parfumée à l’ail et au paprika et fumée. Elle est d'origine portugaise mais on la consomme abondamment dans l'archipel, tout comme le chouriço et le lard (toucinho de porco).

Les basiques de la cuisine cap-verdienne

Le plat national est appelé cachupa. Parfait condensé de la cuisine du Cap-Vert, cette spécialité se compose de maïs, de haricots, de fèves, de manioc, de patates douces et de divers légumes. Pour une cachupa rica, on y ajoute ensuite de la viande (côte de porc, chorizo, saucisses, morcela/boudin noir, etc.), mais elle peut aussi contenir du poulet et de l'agneau. La cachupa simple contient moins de légumes et se prépare principalement avec du maïs, des haricots et du poisson. C’est un plat très apprécié au point même qu'au matin, les locaux préparent la cachupa refogada ou frita, composée des restes de la cachupa de la veille, revenue dans une poêle avec des oignons émincés, de la saucisse et des œufs au plat.

Les influences portugaises ne sont pas loin et on les retrouve dans des recettes proches de la feijoada, comme le feijão congo. Ce ragoût se compose de haricots niébé (parfois surnommés également feijão congo), de lard, de choriço, de chou blanc, de courge et de tomate. Ce plat est parfois préparé avec des ervilha seca ou pois cassés. Sinon testez le jagacida, du riz aux haricots rouges et à l'oignon.

Autre emblème de la cuisine rurale du pays, le xérem est une sorte de polenta crémeuse à base de semoule de maïs. Très basique, ce plat peut toutefois être garni de poissons, fruits de mer, saucisse, viande de porc, oignons caramélisés ou encore haricots secs. Autre plat simple mais très populaire, la canja de galinha est une soupe de poulet avec vermicelles, pomme de terre et carotte.

Plus copieux, le modje de São Nicolau est un ragoût généralement préparé pour Pâques, composé de viande de chèvre avec divers légumes (manioc, igname, patate douce, pomme de terre, courge et bananes plantains). Il existe des variantes avec du poulet ou de l'agneau. Les Cap-Verdiens sont friands de poulet et le frango assado (poulet grillé) local, mariné avec une sauce au piment piri-piri est délicieux.

Les grillades de poissons ou de crustacés sont une des spécialités du pays. On apprécie le thon sous diverses formes, en steak, grillé ou en salade, alors que la caldeirada de peixe se compose plutôt de mérou, poché avec des pommes de terre et divers autres féculents. La langouste est également préparée de manière variée. A tester la lagosta suada, une recette de langouste avec une sauce tomate légère au vin blanc. Enfin, la salada de grão-de-bico com bacalhau est une salade de pois chiches, pommes de terre, morue et œufs durs.

Le poisson se consomme sous forme d'en-cas et d'amuse-bouche, comme la morreia frita, des bouchées de murène (sorte d'anguille) frites ou les croquetes de atum (thon). Le pastel de milho est un chausson à la farine de maïs avec une farce au thon. On retrouve également une version à la farine de blé, qui est tellement appréciée qu'elle est même devenue populaire en Afrique de l'Ouest comme au Sénégal ou en Mauritanie. Les Portugais ont rapporté d'Asie du Sud les samoussas appelés ici chamuças. Ils sont communément farcis de poulet. Pour finir, le torresmo de porco – du lard frit découpé en cubes – est très prisé en apéritif avec un verre de vin ou une bière.

Desserts et boissons

Les douceurs cap-verdiennes possèdent des similitudes avec la pâtisserie portugaise tout en ayant emprunté des influences exotiques comme le cuscuz qui fut apporté d’Afrique par les esclaves. A base de maïs pilé, il est cuit à la vapeur dans des bindes, sorte de couscoussiers en terre cuite. On le coupe ensuite en tranches avant de le déguster chaud, tartiné de mél (mélasse de canne à sucre) et accompagné d’une tasse de thé, de café ou de lait chaud. On le sert parfois avec du fromage de chèvre frais non affiné.

Les bolinhos de mandioca com mel (« petites boules de manioc au miel ») sont des croquettes de manioc frites nappées de mélasse. Sinon on retrouve le gufong, un type de croquettes à base de banane et de semoule fine de maïs, les bolinhos de areia, des biscuits citron-cannelle ou le bolo de milho, un gâteau classique à la farine de maïs. Impossible de rater le pudim de leite, un flan aux œufs et au caramel, aux accents ibériques. Les crèmes glacées et sorbets sont très populaires.

En plus des pommes, raisins et grenades poussant sur les coteaux d'altitude, le climat chaud et sec de l'archipel permet la culture d'essences tropicales comme la papaye, la banane, la mangue et le fruit de la passion qui rentrent souvent dans la confection de jus de fruits. Testez également la calabaceira ou jus de baobab. C'est une boisson très riche en vitamine C, en minéraux et en fibres. A moins de préférer le bissap, une infusion rouge sombre, à base de fleurs d'hibiscus, servie glacée.

On cultive le café depuis près de 300 ans au Cap-Vert, notamment sur l'île de Fogo (dit café do Fogo ou café das Caldeiras). La faible production fait qu'il n'est quasiment pas exporté et il est donc peu connu, alors qu'il est souvent considéré comme l'un des cafés les plus fins du monde, notamment pour sa faible teneur en caféine. Le café Monte Queimado avait même remporté le prix du « Meilleur café de l'empire » à l'exposition coloniale de Porto en 1934. Une prouesse en sachant que le climat très sec de l'archipel sied peu aux caféiers. Le producteur Dja'r Fogo récolte, torréfie et vend son café dans sa boutique à São Filipe.

Alcools

A l'inverse, vers 1 500 m d'altitude, le microclimat ensoleillé et venteux de l’île de Fogo, allié aux riches sols volcaniques, convient bien à la viticulture. Malgré les paysages de roches lunaires, l'épais brouillard qui couvre les sommets pendant la nuit offre une humidité suffisante pour ne pas avoir besoin d'irriguer ces vignobles uniques. Produit depuis près de 120 ans, le vin cap-verdien était d'abord destiné aux anciennes colonies de l'Empire portugais comme le Brésil ou la Guinée-Bissau. Les cépages utilisés sont le muscat blanc et le preta tradicional, originaires de Setúbal, au sud de Lisbonne. On retrouve ainsi le label des vins Chã (du nom du village de Chã das Caldeiras) via l'Associação dos Agricultores de Chã, commercialisé sous l'appellation Vinho de Fogo. Rouges corsés, blancs fruités et rosés pleins de légèreté ces vins titrent à 14°. Sans oublier le vin de paille ou vihno passito, dont les grains de raisin sont séchés sur de la paille avant d'être pressés, donnant un vin riche et sirupeux, idéal en dessert ou en digestif. A noter, le Manecom est un vin traditionnel, mi-doux ou sec, fait maison, souvent destiné une consommation personnelle.

On produit également de l'eau-de-vie de raisin (destilado de uva) et de coing (destilado de marmelo), labellisées « Espírito da Caldeira » avec teneur en alcool de 45 %. On citera aussi le destilado com ervas digestivas, un spiritueux aux herbes médicinales. Proche du rhum, le grogue (grogu) est une eau-de-vie de canne à sucre. Le meilleur serait celui de l'île de Santo Antão, où se concentre la production de canne à sucre dans le pays. Souvent considéré comme la boisson nationale, il est brun ou blanc et très fort, entre 50° et 70°. Il rentre dans la composition du ponche (dérivé du mot anglais « punch »), qui contient également du citron vert et de la mélasse. On retrouve aussi une version aux herbes médicinales à base de romarin, d'anis ou de rue officinale. Enfin, la Strela est la bière locale, dont le nom vient du créole cap-verdien pour « étoile ». C'est la deuxième bière la plus consommée au Cap-Vert, couvrant 35 % du marché, juste derrière la marque portugaise Super Bock.