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Aztèques, mayas et maïs

Bon nombre d’aliments que nous consommons à l’heure actuelle en Europe furent importés du Nouveau Monde au moment de la conquête espagnole à partir du XVe siècle : maïs, pomme de terre, haricot, piment, patate douce, manioc, cacao, tomate, vanille et bien d'autres produits sans lesquels nos gastronomies européennes sembleraient bien plus fades.

Le maïs est consommé au Mexique depuis au moins 9 000 ans. Cultivé par les Aztèques, puis par les Mayas, il atteint par la suite le reste du continent américain grâce aux échanges avec les Incas il y a 3 000 ans alors que les variétés moins frileuses furent plantées par les Indiens Pueblos dans le sud des USA actuels.

Le Mexique est considéré comme le centre de diversité de cette céréale et on dénombre officiellement 64 variétés de maïs dans le pays. Une diversité génétique d'ailleurs menacée depuis l’instauration de l’Accord de libre-échange nord-américain (ALENA), le gouvernement mexicain ayant favorisé l’importation de maïs en provenance de États-Unis, conduisant de nombreux paysans à abandonner sa culture. Un maïs jaune, OGM et bien calibré, à l'inverse des variétés paysannes blanches, noires, violettes, brunes, rouges, bleues ou même arc-en-ciel, permettant aux Mexicains de préparer leurs spécialités depuis des millénaires. Ces grains de maïs sont traités avec du nixtamal, un mélange d'eau et de chaux qui les attendrit avant d'être moulus pour confectionner une pâte (masa) utilisée pour les tortillas.

Le piment (chile) – originaire d'Amérique tropicale – fait partie intégrante de la culture mexicaine et le pays dénombre pas moins de 150 variétés aussi bien utilisées fraîches que séchées. Le puissant jalapeño est vert, croquant et lisse. Une fois fumé et séché, il prend le nom de chipotle. Le poblano ressemble à un petit poivron et est généralement farci. Ce dernier est surnommé ancho lorsqu'il est séché. Le bola – appelé cascabel quand il est sec – a la forme d'une petite boule. Le habanero, ressemblant à un petit poivron fripé jaune ou rouge, est aussi très commun dans les Antilles. C'est l'un des piments les plus forts du monde. Enfin l'árbol – aussi connu en France sous le nom "piment langue-d'oiseau" - est aussi extrêmement piquant. En plus du piment, on retrouve d'autres condiments comme le cumin, la coriandre, l'origan ou l'épazote, aussi appelée "fausse-ambroisie". Le Mexique produit quelques fromages comme le queso fresco, léger et à peine affiné. Le queso añejo est plus affiné, à pâte dure, alors que le queso Oaxaca ressemblerait à de la mozzarella, souvent filé en pelote.

Il est probable que ce soit les Aztèques qui furent les premiers à cultiver les tomates et qui nous ont donnés également le mot "tomatl". A noter qu'au Mexique le terme "tomate" désigne une tomate verte, on dit "jitomate" pour une tomate rouge classique. On dénombre aussi plus de 70 variétés de frijoles ou haricots dans le pays : noirs, beige, blancs, rouges ou tachetés. De nombreuses espèces sont en effet originaires du Mexique et les Aztèques consommaient ces légumineuses depuis des millénaires. Cultivé dans le centre du pays depuis plus de 7 000 ans, l'avocat est l'un des fruits les plus connus du Mexique qui contrôle environ un tiers de la production mondiale. Plus de 90 % des avocats du pays viennent d'ailleurs du petit Etat de Michoacán. On n'oubliera pas les autres fruits tropicaux (agrumes, litchi, ananas, banane, papaye, goyave, noix de coco, zapote, mamey, pitaya, tomatillo, etc.).

Le Mexique est aussi le berceau de quelques bizarreries culinaires. Citons le nopal (feuille du figuier de Barbarie) qui peut être cuit à l'eau ou grillé au feu de bois et dont le goût rappelle un peu les haricots verts ou alors le huitlacoche ou charbon du maïs, un champignon parasite qui transforme les grains de maïs en grosses boules spongieuses et grises. C'est un mets de choix en garniture de tortilla ou en soupe. Les insectes sont également communs. Le chapulin (sauterelle), spécialité d’Oaxaca, se mange généralement grillé dans un taco avec du guacamole, mais on n'oubliera pas les escamoles (larves de fourmis), les chinicuiles ou gusano (appelé "ver d'agave", c'est en réalité une chenille) ou encore la salsa de hormiga, préparée avec des piments et des fourmis de l'espèce chicatana.

La street-food mexicaine

Souvent appelés antojitos, les encas – plus ou moins copieux – de la street-food locale sont généralement confectionnés à partir de tortillas. Les tacos sont de petites galettes que l'on garnit de viande, de poisson et de légumes. Les tacos al pastor ("du berger") par exemple sont préparés avec du porc longuement mariné que l'on émince finement avec du queso fresco, de l'oignon haché et de la coriandre. Les tacos dorados ou taquitos sont aussi appelés flautas à cause de leur forme de flûte. Ils sont roulés avec une garniture, puis frits. Les chalupas sont similaires aux tacos, mais dans des galettes briochées plus épaisses. Les gorditas sont des petits chaussons garnis à la manière d'un taco. Les molotes sont des beignets de pâte de maïs ou de pomme de terre, farcis et frits. On n’oubliera pas bien sûr les tamales, l'un de plats mexicains les plus emblématiques, préparés avec une purée de maïs que l'on fait cuire à la vapeur emballée dans les feuilles qui entourent l'épi de maïs. Ils sont parfois garnis de viande avant la cuisson.

Les antojitos peuvent être parfois très copieux. Le pambazo est un sandwich composé d'un pain imbibé d'une sauce au piment guajillo, puis garni de pomme de terre au chorizo. Ces encas sont souvent servis avec l'incontournable frijol refrito, une purée de haricots noirs. On pense par exemple au huarache, une sorte de large galette de maïs, nappé de frijol refrito avec du queso fresco, des oignons et de la langue de bœuf émincée, ou aux chilaquiles (tacos frits coupés en triangle, nappés de sauce, avec haricots noirs, fromage et œuf frit). Sans oublier les quesadillas, des tortillas pliées en deux, fourrées avec de la viande et des légumes et surtout beaucoup de fromage, alors que le burrito est une tortilla roulée sur une farce à base de viande, de riz épicé et de haricots noirs. Pour finir on n'oubliera pas le chile relleno, une recette de piment farci avec du fromage et/ou de la viande, puis pané et frit.

Les classiques de la cuisine mexicaine

La sauce d'accompagnement la plus répandue est le pico de gallo. Ce mélange de tomate, oignon, ail, citron, coriandre et piment est très frais. Plus riche, le mole est préparé avec différents piments secs et moulus auxquels on rajoute du cacao et diverses épices. La plus connue est le mole poblano (originaire de Puebla), mais il y a aussi le mole verde (préparé avec de la tomate verte) ou rojo (tomate rouge). Cette sauce accompagne généralement la volaille.

Le poulet est en effet une viande populaire, qui peut être préparée de bien des façons, du simple pollo asado (poulet grillé au barbecue) jusqu'au pollo encacahuatado, nappé d'une riche sauce à la cacahuète. On le retrouve sous forme d'escalope panée (pechuga de pollo empanizada) pour un prix dérisoire. Les recettes d’œufs ne manquent pas pour le petit-déjeuner : huevos a la mexicana (œufs brouillés avec tomate-piment-oignon), a la ranchera (œufs au plat avec compotée de tomate à la coriandre, sur une tortilla) ou motuleños (œufs au plat avec haricots noirs, fromage, sauce piquante, banane plantain et jambon sur une tortilla).

Parmi les plats de porc les plus répandus, citons les carnitas (viande cuite plusieurs heures dans du saindoux et effilochée), le chilorio (porc effiloché agrémenté de piment, cumin et ail) et le calabacitas con puerco (ragoût de porc épicé aux courgettes). La cochinita pibil est un plat originaire du Yucatán, composé de porc mariné dans du jus d'agrumes et des graines de roucou (un colorant rouge naturel) longuement cuit dans des feuilles de bananier. On picore aussi des chicharrónes, de la couenne de cochon grillée, comme des chips.

Dans le nord du pays, on consomme le machaca, du bœuf séché mijoté dans une sauce tomate épicée puis effiloché, souvent pour garnir des burritos. Le terme "bistec" désigne de la viande de bœuf grillée finement tranchée et servie en sandwich. Les albóndigas sont des boulettes de viande servies dans une sauce au piment chipotle. On retrouve d'autres plats de viande comme le barbacoa (un type de barbecue au-dessus de la braise ou d'un trou rempli de pierres chaudes préparé avec du bœuf ou du mouton), la birria (soupe épicée de mouton) ou le cabrito al pastor (chevreau grillé à la braise).

Avec plus de 9 000 kilomètres de côtes, le Mexique est un vrai paradis pour les amateurs des produits de la mer. Poissons (espadon, thon, mérou, daurade coryphène, vivanneau) et fruits de mer (crevettes, crabes, langoustes, huîtres, calamars, etc.) sont souvent servis avec du mojo de ajo (beurre et ail) et du mojo a la veracruzana (sauce tomate, oignon, ail, olives, câpres). Le ceviche (poisson cru saisi dans le jus de citron ou de piment), l'aguachile (crevettes et avocat marinés avec jus de citron et coriandre) ou le pescado zarandeado (poisson finement épicé au barbecue) sont également appréciés.

Les potages sont aussi prisés. Le caldo de siete mares est une soupe de fruits de mer et le caldo tlalpeño est un potage de poulet, de légumes et de pois chiches. Le pozole est une soupe épaisse de maïs garnie de porc effiloché, de radis, d'oignon et de piment. L'arroz a la tumbada est une spécialité de riz aux fruits de mer alors que l'arroz poblano cuit dans une purée de piment vert, de coriandre et d'oignon avec du porc effiloché.

Douceurs et boissons

Parmi les desserts mexicains, on retrouve le tres leches (gâteau à la génoise imbibée de lait concentré sucré et nappé de chantilly), les sopapillas (beignets au sucre, parfois nappés de miel, à base de farine de blé, mais contenant parfois aussi de la purée de courge), les buñuelos (petits beignets ronds au sucre), les conchas (brioche couverte d'une croûte de sucre), roscón de reyes (anneau en brioche type gâteau des rois de l'Épiphanie), le pan de muerto (brioche à l'orange et à l'anis décorée d'une croix pour le Día de Muertos, le 1er novembre), le pastel de elote (gâteau moelleux au maïs), l'alfajor (biscuits au dulce de leche nappés de chocolat), les churros et bien sûr le flan (crème caramel). Côté sucreries traditionnelles, pour n’évoquer que les plus célèbres, vous pourrez goûter le muégano (petits cubes de pâte frites agglomérés en boule avec du caramel) et les alegrías (nougat au miel et aux graines d'amarante).

Le chocolate de agua est un chocolat chaud typiquement mexicain, à l'eau et non au lait, que l'on prépare avec un chocolat noir très corsé, le tout parfumé de cannelle, noix de muscade et clous de girofle. Sinon on savourera une horchata, une boisson laiteuse d'origine espagnole à base de riz ou d'avoine, parfumée à la cannelle, et servie glacée. Enfin, le café fut importé depuis l'Ethiopie sur le continent américain au début du XVIIIe siècle, il entre au Mexique par l'Etat de Veracruz puis sa culture se répand dans les Etats du Sud (Oaxaca, Chiapas) et de la côte pacifique (Colima, Jalisco). Ici, le café est le plus souvent préparé à l’américaine, c’est-à-dire très dilué. Le café con leche (café au lait) est une spécialité du petit déjeuner. Le cafe de olla quant à lui est typique du pays : c'est une tisane à base de café, d'épices (principalement de la cannelle) toujours servie dans des tasses en forme de cruches en terre.

Parmi les boissons fraîches citons les licuados, ces délicieux jus de fruits préparés avec du lait, vendus sur des échoppes à des prix dérisoires. Sinon testez la chamoyada, un granité à la mangue, au jus de citron vert et au chamoy (sauce acidulée au piment) ou l'agua de Jamaica (une infusion glacée à l'hibiscus).

Tequila, mezcal y cerveza

La tequila est l’alcool mexicain par excellence. Cet alcool blanc, qui titre au minimum à 35°, prend une couleur ambrée avec l’âge. Cette eau-de-vie d'agave bleue, une plante succulente native du Mexique, est élaborée avec les cœurs d'agave (appelés piñas), pouvant atteindre jusqu'à 100 kg. Ils sont cuits à l'étouffée dans des fours géants appelés autoclaves, avant d'être broyés pour en extraire un jus qui sera distillé. Il faut minimum 2 mois pour obtenir une tequila blanco et jusqu'à 10 ans pour une tequila añejo. Produite depuis la colonisation espagnole, cette boisson doit son nom à la ville de Tequila (Etat de Jalisco) et aujourd'hui la région compte près de 120 distilleries. Sa dégustation à l’état pur s’accompagne d’un véritable rituel qui consiste à mettre sur le dos de la main une pincée de sel qu’on lèche avant de boire une gorgée de tequila, pour enfin croquer dans le quartier de citron vert. Elle est utilisée dans l’élaboration de nombreux cocktails comme la margarita (tequila, citron vert, triple-sec, glace pilée) ou la tequila sunrise (tequila, jus d'orange, grenadine). On peut visiter plusieurs distilleries comme la Destilería La Rojeña, fondée en 1758, la plus vieille d'Amérique latine, la Destileria Herradura (créée en 1870) ou la Casa Orendain (fondée en 1926).

Comme la tequila, le mezcal est un alcool élaboré à partir de l'agave, mais sa production est généralement beaucoup plus artisanale : dans les fameux palenques familiaux de l'Etat de Oaxaca, les cœurs d'agave sont cuits dans des fours traditionnels en terre avant que leur jus ne fermente puis soit distillé. Contrairement à la tequila, le mezcal peut être produit avec plusieurs espèces d'agaves. Pour se protéger des dérives industrielles de la tequila, il existe une appellation d'origine depuis 1994 limitées à quatre Etats : Guerrero, Durango, San Luis Potosi et Zacatecas. Pour le différencier de la tequila, les producteurs ont eu l'idée d'ajouter un gusano dans la bouteille c'est-à-dire une chenille de papillon de l'agave, à partir des années 1940. On le déguste sec, avec des quarts d'orange à croquer et du piment en poudre.

La bière (cerveza) accompagne souvent les repas mexicains. Les meilleures blondes (claras) ont pour nom Corona, Tecate, Bohemia, Superior, Carta Blanca. Pour les brunes (oscuras), la Negra Modelo. Depuis quelques années, on observe une montée en puissance de la fabrication de la bière artisanale. Pour ceux qui se demandent d'ailleurs, la marque Desperados est une création française et non mexicaine. La production vinicole n'est pas négligeable.